Kaboul demande à Berne un arrêt temporaire des rapatriements
L'Afghanistan a demandé début juillet à la Suisse de reporter de trois mois les rapatriements de requérants d'asile déboutés en raison de l'avancée des talibans et du coronavirus. La Suisse maintient toutefois ses renvois vers ce pays.

C'est ce qu'a annoncé jeudi le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) interrogé par Keystone-ATS. Il confirmait des informations de la Neue Zürcher Zeitung (NZZ) et de la radio-télévision alémanique SRF. La demande de l'Afghanistan de surseoir aux renvois jusqu'en octobre a également été envoyée aux Etats membres de l'UE et à d'autres pays européens. Selon le SEM, les raisons invoquées sont les conquêtes territoriales par les talibans et l'augmentation des infections de Covid-19.
Le SEM constate toutefois que les autorités afghanes n'ont pas imposé de restrictions générales à l'entrée sur leur territoire. Les ressortissants afghans peuvent donc continuer à rentrer volontairement, conclut Berne. Les personnes qui n'ont plus de statut de séjour régulier en Suisse et qui doivent quitter le pays peuvent continuer à se conformer à cette obligation et quitter la Suisse de manière autonome.
"Le SEM est conscient de la situation tendue en Afghanistan", précise-t-il. Aussi, l'exécution d'un renvoi forcé n'est donc actuellement "raisonnable que dans des circonstances individuelles particulièrement favorables" - par exemple si les personnes concernées disposent d'un réseau social durable. En outre, les rapatriements ne sont raisonnables que vers les trois villes contrôlées par le gouvernement, à savoir Kaboul, Herat et Mazar-i-Sharif.
Le SEM n'a pas prévu de rapatriements vers l'Afghanistan dans les semaines à venir. Selon lui, la dernière expulsion vers le pays a eu lieu en 2019 (6 renvois), soit avant la pandémie de coronavirus. Auparavant, la Suisse a procédé à 11 renvois forcés en 2017 et aucun en 2018. Par ailleurs, la Suisse a enregistré en 2020 le taux de protection des demandeurs d'asile afghans le plus élevé d'Europe (84%), avance encore le SEM. Actuellement, 168 ressortissants afghans devant quitter le pays se trouvent en Suisse, selon la NZZ.
Les organisations d'entraide demandent depuis longtemps de mettre fin aux rapatriements vers l'Afghanistan. "Au vu de la dégradation de la situation sécuritaire, les renvois de requérants d'asile vers ce pays sont plus que jamais intenables", écrit l'Aide suisse aux réfugiés (OSAR) sur son site. Celle-ci soutient l'appel à l'arrêt immédiat des transferts vers l'Afghanistan lancé par le Conseil européen pour les réfugiés.
Selon l'organisation allemande Pro Asyl, la Cour européenne des droits de l'homme a temporairement interdit à l'Autriche d'expulser un demandeur d'asile afghan mardi. Elle invoque des craintes de traitement inhumain et de torture.