Monica Mendes, ex-internationale portugaise, entraîne désormais en Valais
Après une quinzaine d’années au plus haut niveau, après avoir beaucoup voyagé, Monica Mendes a posé ses valises en Valais. Pas pour jouer mais pour l’amour du football. Elle s’occupe, entre autres, des M18 du FC Sion féminin. Interview.
Monica Mendes, comment et pourquoi êtes-vous arrivée jusqu’en Valais ?
Il y avait une opportunité de développer un nouveau projet en lien avec le football féminin. C’est vraiment le commencement de quelque chose. Après avoir terminé ma carrière à Servette, c’était le projet le plus adéquat pour m’investir. L’objectif étant de permettre aux joueuses valaisannes de disposer d’un encadrement, d’une structure plus compétitive, plus sérieuse, pour qu’elles puissent grandir dans tous les sens du terme. C’est quelque chose qui manquait dans la région. Donc me voici, prête à m’engager dans cette nouvelle aventure.
Qui est venu vous chercher ?
L’entraîneur de la première équipe, Eric Sévérac, était mon coach à Servette. Il m’a parlé du projet qui était en train de se mettre en place ici en Valais. Son impulsion est indéniable. Par ailleurs, nous avions une super relation à Genève. J’étais sa capitaine. Il a toujours cru en mon potentiel comme coach également, puisque je travaillais déjà dans l’académie du Servette avec les garçons. Il a senti que j’étais la bonne personne pour ce nouveau projet. Et puis, dans le lot des propositions que j’avais sur la table, celle-ci me semblait être la bonne, c’est pourquoi j’ai accepté.
Justement, est-ce que vous avez étudié d’autres propositions ?
Il y en a eu quelques-unes. J’aurais pu, par exemple, poursuivre ma carrière de joueuse. Mais après toutes mes saisons à Servette, après tout ce que j’avais vécu là-bas, je sentais que c’était le bon moment, la bonne façon de dire stop. D’autres invitations ont surgi, y compris à Genève. Celle présentée en Valais est celle qui m’a le plus challengé, parce qu’il y avait tout à construire. Je veux me développer comme coach, pouvoir apprendre et faire des erreurs. Pouvoir surtout accompagner ces jeunes pour qu’elles puissent grandir et devenir meilleures.
Et comment ça se passe alors ?
Super bien. On a toujours quelques soucis d’effectif avec les M18. Le groupe n’est pas toujours au complet à l’entraînement. Mais de manière générale ça se passe très bien. Les joueuses sont réceptives. Elles apprennent tous les jours. On est encore au début du processus. Les résultats ne sont pas forcément au rendez-vous mais ce n’est pas l’essentiel. Je vois beaucoup de potentiel. Du talent, il y en a. Il manque le reste… la mentalité, la rigueur, le fait de travailler bien et beaucoup. C’est pour ça que nous sommes là. Pour les aider.
Vous avez vécu plusieurs années à Genève. À quoi ressemble votre quotidien en Valais ?
Travailler, travailler, travailler (rires). C’est très différent en termes de rythme. Je m’occupe de plusieurs choses. Je prépare les entraînements des M18. Je suis également en charge de la préparation physique de toutes les équipes du FC Sion féminin. Sans parler de mon travail avec la structure sport-études à Grône, ou encore de quelques coachings privés que j’exerce en tant que personal trainer. En gros, je vis à 100% pour le sport, pour aider les gens à atteindre leurs objectifs et en l’occurrence les équipes du FC Sion à devenir plus compétitives. Avec le temps, les résultats viendront.
Et sur un plan personnel, beaucoup de changement aussi on imagine ?
J’adore ! Au Portugal, il n’y a pas tous ces sommets enneigés. Je me sens encore comme une enfant quand j’admire la nature autour de moi. C’est un endroit privilégié pour pouvoir vivre. Faire des balades, respirer l’air pur. À Genève, j’étais dans la peau d’une citadine. Ici, il y a une forme de liberté. C’est un peu nouveau pour moi mais je m’adapte bien. Ça me plait.
À Genève comme en Valais, vous trouvez toujours quelqu’un pour parler dans votre langue aussi ?
Ça, c’est le plus facile. C’est vrai que mon français est encore un peu bancal. J’y travaille. Mais le fait de savoir qu’il y a toujours un peu de Portugal et de sa culture quelque part, ça me permet de me sentir plus proche de la maison. C’est essentiel.
Revenons au football féminin. Est-ce qu’il y a des grandes différentes entre ce que vous avez vécu au Portugal et ce qui se fait ici en Suisse ?
Ça dépend. Si on parle de mentalité, ce n’est pas comparable. C’est un pays latin. Les petites filles qui aiment le foot, le vivent et l’embrassent d’une manière singulière, avec beaucoup d’instinct et de passion. Ici, la passion n’est pas moins grande mais l’approche culturelle est différente. Ce sont deux réalités. La Suisse, en revanche, se positionne très bien pour la préparation physique des jeunes athlètes, notamment dans la partie alémanique. Je dirais même qu’au final, les footballeuses helvétiques sont plus complètes. C’est presque une opposition de style, dans la pratique et dans la mentalité. Ici, il y a les moyens de faire mieux mais les priorités sont différentes. Au Portugal, on fait beaucoup avec pas grand-chose.
Ici ou là-bas, est-ce que vous constatez encore une forme de résistance de la société par rapport aux aspirations et aux rêves des jeunes footballeuses ?
Je crois qu’on n’interdit plus personne de rêver. L’acceptation a fait son chemin. Ce qui change d’un pays à l’autre, et qui influence donc les trajectoires, c’est le niveau de vie. En Suisse, les coûts sont très élevés. Et une carrière dans le football féminin ne permet pas de dégager un salaire suffisant pour payer les factures. À partir d’un certain âge, les joueuses doivent faire un choix. Et souvent, elles abdiquent du foot pour se diriger vers une profession normale, qui rémunère mieux.
Et vous travaillez justement avec cette génération "charnière" qui se construit un avenir en misant tant sur le foot que sur les études...
Exactement. Ça demande beaucoup de flexibilité. Plusieurs joueuses sont en apprentissage. Certaines travaillent. Il faut gérer les horaires des unes et des autres. Moi, je m’adapte le mieux possible. Chaque cas est différent et je fais ma part pour gérer l’agenda et pour maximiser le potentiel de chacune.
Et quelle importance donnez-vous au parcours scolaire des plus jeunes ?
Pour moi, c’est fondamental. En tant qu’ancienne joueuse mais aussi en tant qu’étudiante diplômée, j’attache une immense importance au parcours scolaire. Cela fait partie intégrante du développement personnel de chacune. Nous voulons des bonnes footballeuses mais aussi des bonnes élèves. Ou en tout cas qu’elles puissent donner le meilleur d’elles-mêmes. Dans la culture de football d’élite que nous voulons construire, tout est lié. Tout va de pair. En gardant bien sûr le bon équilibre. Je sais que ce n’est pas toujours facile. Mais mon message est très clair à ce sujet. D’autant que je suis passée par là. Quand on sait ce qu’on se veut, qu’on sait où on veut aller, tout est possible dans la vie.
Et quel est le football que vous prônez ? Beaucoup de tactique, un peu d’instinct ?
En ce moment, j’attache surtout de l’importance à la possession. Le ballon est notre meilleur ami, on doit savoir en prendre soin. Et quand on le perd, il s’agit d’être rapide à la récupération. Le football c’est simple en réalité… même si on le rend compliqué parfois. Dans le processus qui est en cours, je parle surtout de dynamique globale. Et de courage, de confiance et de prise de risque. En ayant à l’esprit que c’est toujours possible de transformer cela en victoires une fois sur le terrain, pour atteindre les objectifs.
Justement, au-delà des résultats, quels sont les objectifs que vous avez fixés ?
Si ça ne tenait qu’à moi, je voudrais surtout gagner tous les matches. Mais il s’agit d’être réaliste. Si dans un an, les joueuses sont mieux armées physiquement, tactiquement et mentalement pour les matches et les entraînements, ça serait déjà une grande victoire. Il s’agit aussi de leur apprendre la régularité, dans les performances comme dans les résultats. C’est la base du développement.