Arrivé à la tête du Rallye du Valais il y a six ans, Cédric Borboën quitte l'organisation. Celui qui avait succédé à Christian Dubuis transmet les rênes à un comité de sept personnes pour organiser l'édition 2022, agendée du 13 au 15 octobre 2022. Interview de Cédric Borboën qui explique les raisons de son départ et fait le bilan de son aventure à la direction générale du RIV.
Cédric Borboën, vous avez annoncé quitter l’organisation du Rallye du Valais. Pourquoi ?
Pour plusieurs raisons. Tout d’abord, j’aimerais me recentrer sur le Forum économique romand que j’ai créé il y a dix-sept ans et qui demande, dans le contexte d’aujourd’hui, beaucoup plus d’attention. Et puis, cette décision me trottait dans la tête depuis un petit moment.
Quel a été le déclic ?
J’en ai discuté avec mon entourage proche, à savoir Patrick Borruat, le directeur de course, et Yves Zappellaz, le directeur de la sécurité. Ils ont tout de suite fait part de leur volonté de continuer et de trouver des gens qui ont la flamme et qui viennent du milieu du rallye. C’était plus facile pour moi de me retirer en sachant que la manifestation était maintenue. A mes yeux, c’était le plus important.
«C’était plus facile pour moi de me retirer en sachant que la manifestation était maintenue. A mes yeux, c’était le plus important.» Cédric Borboën
Le choix a-t-il été facile à faire ?
Non, évidemment. Il y a six ans, je débarquais dans le rallye. J’ai découvert un milieu passionnant et j’aurais voulu continuer l’aventure. Il est certain que les deux années COVID n’ont pas aidé, mais ça reste une belle manifestation. Le Valais est un bel endroit pour l’organiser. Il y a encore du potentiel. C’est la raison pour laquelle des gens s’impliquent autour dans un comité élargi. L’édition 2022 sera magnifique.
Elle a lieu dans six mois. Pourquoi avoir attendu si longtemps pour annoncer votre départ ?
Simplement pour l’annoncer en ayant une solution cohérente à présenter, et ne pas juste dire que je pars sans assurer la suite. Cette nouvelle équipe travaille activement sur la nouvelle édition. Je vais bien entendu lui laisser le soin de communiquer sur celle-ci. Mais c’était important pour moi que la passation se fasse de manière naturelle et dans un contexte sain.
Au moment de vous retirer, quel bilan dressez-vous ?
Un bilan tout de même positif. On a pu organiser quatre éditions. La dernière, en octobre 2021, a été très compliquée à mettre sur pied. Je suis fier qu’on ait réussi, même si tout n’a pas été parfait. On a dû faire avec ce qu’on avait, que ce soit financièrement ou en termes de ressources humaines. Sans oublier les contraintes liées à la pandémie. Mais il était capital que le rallye ait lieu pour qu’il survive et reste pérenne.
L’édition 2021 a-t-elle été bouclée dans les chiffres noirs ?
On arrive tout juste à l’équilibre. On est en train de traiter les derniers éléments, de recevoir les derniers subsides.
«Ma décision, sans être actée, était déjà en réflexion avant la dernière édition.» Cédric Borboën
Après cette dernière édition, vous avez été personnellement critiqué par une partie des bénévoles et des passionnés de rallye. Ça a pesé dans votre décision de partir ?
Non, pas du tout. Ma décision, sans être actée, était déjà en réflexion avant la dernière édition. Après, on est toujours à l’écoute de ce qu’il se dit. Dans ce cas précis, j’estime que la manière dont ça a été fait (ndlr : principalement sur les réseaux sociaux) n’était pas correcte. D’autant que les gens qui ne sont pas dans l’organisation n’imaginent pas le 10% des contraintes qui ont été les nôtres. Avec les moyens à disposition, on n'avait simplement pas le choix de faire comme on a fait.
En octobre, vous annonciez sur Rhône FM avoir investi 100'000 francs dans le rallye du Valais. Cet argent, l’avez-vous perdu en vous retirant ?
On peut dire ça comme ça… Avant que je reprenne la manifestation, le rallye arrivait à se financer quasiment qu’avec la course. On avait de gros sponsors du secteur automobile qui depuis, en raison de la situation, se sont retirés. Il a fallu aller chercher l’argent ailleurs et se tourner vers d’autres horizons. C’était le but annoncé quand j’ai repris l’organisation. Christian Dubuis (ndlr : prédécesseur de Cédric Borböen) a toujours dit qu’il ne voulait pas développer la partie évènementielle. Quatre éditions plus tard, même si elle essuie des critiques, cette partie est essentielle pour que la compétition ait lieu.
«Sans la pandémie et après l’édition 2019 et la venue de la superstar Ken Block, on aurait pu partir sur des bases très intéressantes.» Cédric Borboën
Mais vous partez après quatre éditions…
Je n’ai pas de regret. C’était le plan, c’est-à-dire dépenser un peu d’argent pour développer ce côté évènementiel. Sans la pandémie et après l’édition 2019 et la venue de la superstar Ken Block, on aurait pu partir sur des bases très intéressantes... Mais ce n’est pas la raison de mon départ. Je le redis, je souhaite me concentrer sur d’autres projets.
Reste que si le rallye du Valais vous rapportait de l’argent, vous resteriez. C’est un échec ?
Non. Ce qu’on peut dire, c’est qu’avec davantage de moyens, on aurait pu avoir davantage de personnes dans les postes-clés. En quatre éditions, le rallye est passé d’un budget de 1,2 million à 700'000 francs. Ça devenait délicat. J’étais content d’arriver à l’équilibre l’année dernière.
Moins d’argent, une image du rallye dans la société qui n’est pas toujours positive (pollution, bruit, etc.). Vous êtes confiant pour l’avenir du rallye du Valais ?
Oui, je suis confiant. Au-delà de cette image – que je ne défends pas du tout par ailleurs – le rallye du Valais attire du monde et apporte économiquement. Ces 700'000 francs sont investis dans la région. Et puis, on voit de moins en moins de moteurs thermiques, les voitures font de moins en moins de bruit. C’est un sport qui change. La partie électrique doit peut-être se développer.
C’est le conseil que vous donnez à vos successeurs: miser sur l’électrique ?
Je ne sais pas. Pour l’instant, ça reste délicat. Le rallye du Chablais a réussi à se placer sur l’électrique, bravo à lui. Mais je ne crois pas qu’on soit prêt, au niveau compétition s’entend, pour vraiment amener quelque chose. Sur le WRC, ils ont des moteurs thermiques et électriques, avec l’électrique utilisé sur les secteurs routiers. Au rallye Monte Carlo, ils ont fait 3,6 km en électrique sur 300 km de routier… donc ça reste anecdotique.