Cinémas ouverts et écrans noirs: les salles font face à une pénurie de films à projeter

Malgré la réouverture, les cinémas suisses n’ont plus assez de films à projeter. Productions américaines en standby. Réalisateurs suisses frileux. Une réflexion est nécessaire pour attirer le public.
Des cinémas ouverts… et des écrans noirs. Malgré la réouverture des salles, les cinémas suisses et valaisans font face à une pénurie de films à projeter. Sur les programmes, quelques films d'animation côtoient des comédies françaises. Mais d'Outre Atlantique c'est le désert : productions en standby et sorties des blockbusters reportées. «On prend ce qu’on nous donne, on n’a pas le choix, reconnaît Meryl Moser, directrice de Cinérive, qui gère les salles d'Aigle et de Monthey notamment. Nombreux sont les producteurs américains qui préfèrent retarder la première de leur film, pour éviter les flops économiques. Or ce sont précisément ces longs métrages à succès qui nous permettent de proposer des programmes variés et de maintenir des séances cinéphiles, moins rentables à elles seules.»
La situation oblige certains exploitants à faire des choix. A Monthey et Aigle, les cinémas resteront fermés cet été. A Martigny, une des deux salles est actuellement en mode relâche. Et si à Sion, toutes les salles sont ouvertes, la programmation y tourne aussi au ralenti.
Ressortir des classiques?
Plusieurs films devraient sortir à la fin de l’été. D’ici là, pourrait-on profiter de ce creux pour reproposer des films à succès, anciens ou récents, à l'image des cinémas Openair ? «Je pense qu’il n’y aurait aucun intérêt à le faire, tranche Charles-André Walser, directeur des cinémas de Sion. Le charme de l’Openair réside dans son cadre. C’est un produit à part entière. Projeter un film vieux de six mois dans les mêmes salles n’aurait que peu de succès.»
Et les films suisses ?
Moins de films d'Outre Atlantique pourrait rimer avec aubaine pour les longs métrages du terroir. Sauf que les réalisateurs suisses aussi préfèrent rester prudents. Les explications d'Isabelle Coppey, coordinatrice au sein de Valais Films, qui regroupe les professionnels valaisans de l'audiovisuel. «Les cinéastes helvétiques font face au mêmes dilemmes que les américains. La sortie d’un film est un événement particulier que beaucoup ne veulent pas gâcher. Plusieurs premières qui devaient avoir lieu ce printemps ne seront pas ré-agendées avant l’hiver, voire l’année prochaine.»
Pour sa part, le réalisateur suisse Claude Stadelmann entend projeter son dernier documentaire, tourné à Madagascar, à Aigle ce vendredi et à Sierre, samedi et lundi. Mais lui-même le concède. Si ses créations sont accessibles à tous, elles ne peuvent pas compenser l'affluence des blockbusters. «L’intérêt que peut porter le public sur mon film n’est pas le même que si je projetais une comédie romantique tournée dans les rues de Tananarive. C’est un sujet plutôt anthropologique et ethnographique, qui n’attirera qu’un public averti.»
D’autres pistes...
Pour attirer le public sous de nouvelles formes, des cinémas n’hésitent pas à se réinventer. Exemple sur la Riviera, où Cinérive met en location des salles au public, sous la bannière "votre salon". En Valais, Valais Films promet d'engager des discussions avec les exploitants pour marcher main dans la main. «Pourquoi pas créer des soirées thématiques, en sortant les archives des ralisateurs de la région par exemple...», imagine Isabelle Coppey.