Braconnage à l'éponge dans le Val de Bagnes, vraiment ?
Il y a dix jours, le "Groupe Loup Suisse" lançait l'alerte sur les réseaux. De possibles cas de braconnage à l'éponge pourraient avoir lieu dans le Val de Bagnes. Nous avons tenté de démêler le vrai du faux dans cette histoire.
Si des chiens sont bien morts par empoisonnements dans le Val de Bagnes, nous avons voulu savoir si la méthode des éponges pouvait être démontrée. Pour rappel, le piège à l'éponge consiste à imprégner des bouts d’éponge d’odeur de viande et de les déposer au sol. Dès que le prédateur avale ce bout d’éponge, ce dernier se gonfle au contact du liquide se trouvant dans son estomac et provoque une occlusion intestinale. L’animal meurt après une lente et douloureuse agonie.
Si cela fait grand bruit, c'est que ces pièges sont d'ordinaire destinés à tuer le loup, mais peuvent être ingurgités par n'importe quel autre petit prédateur, y compris les chiens.
Rappel des faits
L'affaire commence le 22 octobre 2024, quand une personne annonce la mort de son chien sur les réseaux sociaux : " Après une belle matinée de chasse sur les hauts de Verbier, notre chien s'est mis à vomir du sang. Immédiatement amené chez le vétérinaire, il est mort pendant le transport, diagnostic : empoisonnement ".
Un mois plus tard, le 20 novembre, le "Groupe Loup Suisse" s'empare de l'affaire et publie à son tour une alerte sur sa page Facebook : "Nous vous avisons qu'un chien de chasse est décédé dans la région de Verbier. Il y a de très fortes probabilités pour que la méthode des éponges ait été utilisée dans ce cas précis. Une autopsie a été effectuée, les résultats devraient montrer que ce mode de braconnage est à nouveau présent dans la région de Verbier/Châble (Val de Bagnes)".
"Groupe Loup Suisse"
Après avoir eu vent de cette histoire, nous avons donc contacté le "Groupe Loup Suisse". Au fil de nos échanges, ils nous ont affirmé que dans le cas en question une autopsie aurait été effectuée, que le résultat de cette autopsie prouverait la présence d'éponge dans le ventre du chien et que le propriétaire aurait déposé une plainte pénale. De plus, ils affirment que le Service de la chasse aurait été informé et mènerait une enquête.
Nous leur avons demandé de nous fournir une copie de l'autopsie et le nom de la personne qui aurait déposé une plainte. Nos demandes sont restées infructueuses.
La recherche de preuves
Nos recherches ont commencé auprès du Service cantonal de la chasse. Ce dernier affirme n'avoir jamais eu vent de cette histoire. De plus, il confirme ne pas mener d'enquête sur la question. Si lors de la première alerte sur ces pratiques le Service avait réagi, aujourd'hui, il ne semble pas vouloir donner suite à cette histoire.
Le vétérinaire cantonal a de son côté eu vent de l'affaire de la mort du chien par empoisonnement, mais assure ne pas avoir été lié à cette dernière d'une quelque façon. Ni par le biais d'une enquête ni par la demande d'une quelconque autopsie.
Les chasseurs du Val de Bagnes ont, pour leur part, bien un collègue qui a perdu son chien dernièrement, mais ils affirment qu'aucune autopsie n'a été demandée et qu'aucune plainte n'a été déposée.
Quant à la plainte, le ministère public n'a pas pu nous confirmer sa véracité, car le nom de la personne en question ne nous a pas été dévoilé.
Nous précisons que personne n'a accepté de parler de l'affaire à notre micro…
Des preuves introuvables
Après avoir eu de longs échanges avec le "Groupe Loup Suisse", les services de l'état concernés et les chasseurs du Val de Bagnes, aucune preuve de braconnage à l'éponge n'a pu nous être fournie. Que ce soit, des échantillons retrouvés sur le terrain, le rapport d'autopsie, ou encore le nom de la personne qui "aurait" porté plainte, rien, à l'heure actuelle, ne nous permet de confirmer la pratique des éponges dans le Val de Bagnes. Ce qui est sûr en revanche, c'est que des chiens sont bel et bien morts par empoisonnement.
Contexte
En février de l'année dernière, nous avions déjà couvert une affaire similaire en donnant la parole au "Groupe Loup Suisse" ainsi qu'au Service valaisan de la chasse.
"Groupe Loup Suisse" évoquait la présence de ces pièges à Verbier, Finhaut et dans l'Entremont : "Notre source a confirmé la présence d’éponges en nombre dans lesdites régions". De son côté, le Service de la chasse indiquait n'avoir jamais trouvé ce genre de pièges sur le terrain : "Jusqu’à présent, on n'a ni retrouvé d’éponges ni eu d’annonces de particuliers ni d’animaux retrouvés morts à cause de ce procédé". La vigilance avait toutefois été demandée :" Les gardes chasses sont sur le terrain dans le cadre du monitoring contre les grands prédateurs. Je leur ai demandé d’être vigilant. Il n’y a pas de recherches actives dans les zones concernées".