Basket : Les clubs valaisans nagent en eaux plus ou moins troubles
Dans le flou régnant toujours dans le monde du sport en raison de la pandémie du coronavirus, on a beaucoup entendu parler de football et de hockey sur glace, beaucoup moins de basket. Nous avons donc pris des nouvelles des trois clubs valaisans de l’élite qui, tous, doivent faire face à leur lot de problèmes.
Car si la cote de popularité et les revenus engendrés par le basket sont bien loin de ceux des deux autres sports, aussi bien le BBC Monthey-Chablais qu’Hélios Basket et le Portes du Soleil BBC Troistorrents font face à des tourments relativement similaires à ceux de leurs homologues des pelouses et de la glace. Tour d’horizon.
La survie du BBC Monthey-Chablais dans l’élite remise en doute
Des trois formations valaisannes de première division, le BBC Monthey-Chablais est certainement celle dont la situation est à ce jour la plus critique. Bien que, comme le relève le président du club chablaisien Yannick Buttet, il est difficile de comparer basket féminin et masculin, notamment d’un point de vue financier, les Sangliers sont en effet les seuls dont la présence même au sein de l’élite ces prochains mois n’est pour l’heure pas assurée. Une incertitude que confirme l’homme fort du Reposieux : «On a aujourd’hui un gros besoin de liquidités et on attend donc avec impatience la décision de la Confédération sur un éventuel soutien. Si nous l’obtenons et que nous pouvons remettre les comptes à zéro, nous envisagerons de poursuivre en SB League, dans le cas contraire, nous serons obligés de nous poser de grosses questions. La bonne nouvelle c’est que nous avons une licence et que cela nous permet de travailler d’arrache-pied pour essayer de mettre sur pied cette saison en première division. Mais vraiment, on peut le dire, nous sommes suspendus aux lèvres de Berne pour savoir ce qu’il adviendra dans le futur.»
«Avec l’annulation des playoffs et de la demi-finale de Coupe, c’est des dizaines de milliers de francs qui manquent»Yannick Buttet - Président du BBC Monthey-Chablais
Des liquidités, le BBC Monthey-Chablais en a notamment été privé en raison de la fin abrupte de la saison dernière. Rappelons que les «jaune et vert» étaient engagés en playoffs et qu’ils s’apprêtaient à disputer une demi-finale de Coupe de Suisse. L’annulation de ces deux événements a forcément été assez difficile à digérer pour Yannick Buttet : «On est restés totalement sur notre faim. On avait envie de jouer ces matches, pas uniquement pour l’aspect financier mais aussi pour le côté sportif. On avait vraiment envie de fédérer la région car on sait que dans ces moments-là, le public se déplace en nombre et ça génère une dynamique très positive pour le club. Donc on était vraiment très déçus. Et bien sûr que ça représente un gros manque à gagner financier. Des dizaines de milliers de francs qui, aujourd’hui, manquent pour boucler la saison.»
Pour combler ce manque de fond, outre une aide de la Confédération, Yannick Buttet espère bien sûr pouvoir continuer à compter sur le soutien des sponsors du club. Même s’il est conscient du risque existant de voir l’un ou l’autre se retirer, au vu de la situation financière délicate qui touche l’ensemble des secteurs cette année: «Le problème dans tous les domaines, c’est l’incertitude qui règne depuis plusieurs mois. C’est pour cela que les PME n’osent peut-être pas vraiment s’engager. Une partie de nos sponsors nous ont néanmoins confirmé qu’ils resteraient à nos côtés, reste maintenant à déterminer si les sommes qu’ils investiront seront similaires à celles de ces dernières années. Et bien sûr que d’autres attendent de voir comment évolue la situation économique avant de repartir pour un tour.»
«On veut redévelopper le club autour de jeunes joueurs de la région»Yannick Buttet - Président du BBC Monthey-Chablais
Malgré toutes ces incertitudes financières, le BBC Monthey-Chablais doit essayer de construire une équipe et de préparer tout de même une saison qui débutera dans moins de deux mois. «On part du principe que nous évolueront toujours dans l’élite», assure Yannick Buttet. «On espère bien sûr pouvoir continuer à compter sur notre entraîneur Patrick Pembele. Mais je ne me fais pas trop de soucis là-dessus, on s’est déjà mis d’accord sur la politique que l’on souhaite mettre en place au sein du club. On veut le redévelopper sur plusieurs années en misant sur des jeunes et des joueurs de la région. On a cette volonté d’éviter de dépenser de l’argent sur des éléments qui, certes, font le spectacle mais qui ne rentrent pas dans la mentalité familiale qui est la nôtre. Au vu de la situation, avec notamment plusieurs clubs qui ont disparu, on est aussi convaincus que nous aurons la possibilité d’aller chercher des joueurs à relativement moindres coûts.»
«Je n’ai pas pour habitude de quitter un navire qui prend l’eau»Yannick Buttet - Président du BBC Monthey-Chablais
Outre ces soucis d’ordre financiers et sportifs, le flou entoure également le rôle même de Yannick Buttet au sein du club puisque sa position à la présidence a été en partie remise en question suite aux nouvelles accusations à son encontre ces dernières semaines. Le principal intéressé l’affirme pourtant: son intérêt personnel n’est pas la priorité: «L’urgence, c’est de boucler la saison 2019/2020 et de planifier celle qui vient. Les questions de comité ne doivent pas être au centre des discussions. Ce qui compte, c’est la formation des jeunes, l’esprit que l’on veut instaurer dans le club et le fait d’avoir une équipe en SB League. Et à titre personnel, je n’ai jamais eu pour habitude de quitter un navire qui prend l’eau donc j’attendrais que sa coque soit solide pour éventuellement le remettre, je l’espère, à une personne issue du monde du basket.»
Un déficit qui représente le 50% du budget à Hélios
Du côté d’Hélios Basket, les difficultés existent aussi. Notamment d’ordre financier puisque la moitié du budget manque pour l’heure dans les caisses vétrozainnes: «Nous avons toujours travaillé comme la fourmi, à savoir en essayant d’avoir une petite réserve. C’est ce qui nous a permis de boucler la saison dernière mais malgré tout, nous avons un déficit de 90'000 francs», témoigne le président historique du club Michel Huser. «Celui-ci s’explique notamment par le non-remboursement de billets d’avion, les frais sanitaires ou un appartement vide dont on doit payer les loyers de mars à septembre. Pour être totalement transparent, ce manque à gagner équivaut au 50% de notre budget annuel, c’est une charge absolument énorme.»
«On compte sur un élan de solidarité»Michel Huser - Président d'Hélios Basket
Pour combler ce trou béant, Michel Huser espère pouvoir compter sur le précieux soutien des partenaires du club: «On compte sur la fidélité de nos sponsors et sur un élan de générosité qui serait bienvenu. De notre côté, nous avons déjà organisé plusieurs séances de comités et l’ensemble des membres a très bien réagi. Tous ont assuré qu’ils allaient tout mettre en œuvre de leur côté pour renflouer les caisses du club.»
En plus de 47 ans de présidence à la tête du club, Michel Huser a vu et connu de nombreuses choses. Mais il reconnaît que ce qu’il vit cette année est totalement inédit. «Comme tout le monde, j’ai plongé dans l’inconnu. Ca été et ça reste encore très difficile de tout assumer, que ce soit sur le plan personnel ou professionnel.»
«On voulait prouver à nos sponsors et notre public qu’on est là et qu’on veut travailler»Michel Huser - Président d'Hélios Basket
Malgré la crise et le manque de fonds, Hélios-Basket a œuvré pour préparer la nouvelle saison en engageant notamment plusieurs nouvelles joueuses. Un signal important à l’intention des suiveurs des pensionnaires de la Salle de Bresse selon Michel Huser. «On a essayé de toujours être optimistes. En allant chercher trois étrangères, on voulait prouver à nos sponsors et à notre public qu’on est là, qu’on veut travailler, qu’on a des jeunes qui veulent jouer au plus haut niveau et pour viser le plus haut possible on a donc engagé des joueuses de qualité. Tout cela, en faisant bien entendu attention de limiter le montant des contrats.»
Michel Huser dit vouloir viser haut lors de la saison à venir, et pourquoi pas retrouver les sommets avec lesquels Hélios-Basket a flirté durant de longues années dans un passé pas si lointain: «On espère déjà que la saison puisse se dérouler dans les meilleurs conditions. De notre côté, on a évoqué l’hypothèse d’un cas de coronavirus dans notre équipe ou chez l’un de nos adversaire. Ca obligerait forcément à modifier un peu le calendrier. Mais au vu du suivi proposé par Swiss Basket, je pense que tout est réuni pour que la saison aille à son terme et qu’un titre soit décerné. Et à ce niveau-là, on va tout faire pour qu’être un challenger de qualité.»
La crainte d’une absence de public à Troistorrents
Du côté du Portes du Soleil BBC Troistorrents, l’autre pensionnaire de SB League Women dans le canton, la crainte du président Fabrice Miserez s’articule avant tout sur de potentielles rencontres disputées en l’absence de public ou avec des mesures très restrictives: «On sait que l’on marche grâce au public, à la buvette, à toutes ces entrées et donc forcément que l’on craint une saison disputée à huis-clos ou presque et une éventuelle annulation de notre soirée de soutien. Si tout cela arrive, cela poserait de grosses difficultés.»
«Comment garder notre côté convivial avec les masques et la distanciation sociale?»Fabrice Miserez - Président du Portes du Soleil BBC Troistorrents
Le nouvel homme fort du club chorgue (il a succédé à Jean-Michel Rouiller au mois d’avril) ne pense pas que le public boudera la salle du Reposieux, où Troistorrents s’exilera cette saison encore, en raison des mesures sanitaires qui y seront imposées. En revanche, il redoute que celles-ci viennent modifier ce qui fait le succès du club en temps normal : «Au vu de la fin anticipée de la saison dernière, j’entends de tous les côtés que les gens ont hâte que ça reprenne, ils adorent vraiment le club et le basket en général donc je ne pense pas qu’ils viendront moins aux matches. Maintenant, le plus gros problème, c’est que ce qui fait notre succès est la convivialité, notamment grâce à notre raclette à la fin des matches et je me demande comment garder ce côté convivial et chaleureux avec les masques et la distanciation sociale… »
«On est sereins pour la saison à venir»Fabrice Miserez - Président du Portes du Soleil BBC Troistorrents
Comme ses homologues de Monthey et Hélios, Fabrice Miserez a été soumis à quelques tourments d’ordre financiers ces derniers mois. Mais au contraire des deux autres clubs, le Portes du Soleil BBC Troistorrents a déjà pu compter sur une aide bienvenue de la Confédération: «Effectivement et heureusement. On a aussi eu de l’aide de la commune et tout cela nous a permis de mettre les comptes à zéro et même d’être assez sereins pour la saison à venir. Si l’on avait dû démarrer celle-ci en étant en négatif et en ne sachant pas comment elle va se dérouler, on ne se serait certainement pas lancés… »
Désormais lancés, quels sont les objectifs des Chorgues pour la saison à venir? Difficile à définir pour Fabrice Misserez qui sait que faire aussi bien que son prédécesseur sera compliqué: «C’est dur de définir des objectifs concrets puisque seulement trois joueuses de l’effectif étaient déjà là l’année dernière. On a un nouveau coach, un nouveau partenariat avec Martigny et beaucoup de jeunes joueuses ou d’éléments qui évoluaient en LNB donc il y a pas mal d’incertitudes. L’idée, c’est de ne pas mettre trop de pression sur l’équipe, de laisser travailler le coach et de construire quelque chose à moyen terme.»
Pour Portes du Soleil BBC Troistorrents, Hélios-Basket et le BBC Monthey, même si une grande part de flou persiste, le compte à rebours est désormais lancé : la reprise des championnats est prévue le 10 octobre prochain
Si la crainte de voir le championnat de SB League redémarrer sans le BBC Monthey existe, le directeur technique de Swiss Basket Erik Lehmann se veut optimiste pour les Sangliers: «Notre commission d’opposition a estimé que la situation des Montheysans était viable, pour autant qu’ils reçoivent une aide. Le dossier est désormais dans les mains de Swiss Olympic et de la Confédération qui devront trancher mais nous sommes optimistes sur le fait qu’un geste sera fait et qu’ils pourront ainsi éponger tout ou partie de leurs dettes de la saison écoulée et des années antérieures.» La décision qui scellera une bonne partie de l’avenir du BBC Monthey-Chablais est en principe attendue pour la semaine prochaine.