La Bande à Fasel au cœur d'un documentaire cinéma : entretien avec une figure de l'anarchie romande
On l’appelait le Robin des Bolz ou le Roi de l’évasion dans les années 70. Jacques Fasel, porte-drapeau de la bande à Fasel, braqueur et anarchiste romand, était de passage à Sion cette semaine. Son histoire est au cœur d’un documentaire, projeté en salle. Rencontre.
C’est un nom qui a marqué les années 70 : celui de Jacques Fasel. Dans la presse, il a été surnommé "Robin des Bolz" (en référence à un quartier de Fribourg) ou "Roi de l’évasion" - Lui nous confie qu'il se considère plutôt comme un "bandit social". Mais dans les faits, il a surtout été le porte-drapeau de la "Bande à Fasel", cette clique de braqueurs anarchistes qui a fait la une loin à la ronde pour leur Hold up et actions coup de poing, perpétrés au nom de la redistribution sociale.
Et si on parle de lui aujourd'hui, c'est que le Fribourgeois était de passage à Sion cette semaine. Au cinéma de Sion, plus précisément. Pour cause : son histoire et celle de ses acolytes reviennent sur la scène, au cœur d’un documentaire actuellement en salles : « Autour du feu », coréalisé par Laura Cazador et Amanda Cortès.
Une confrontation intergénérationnelle
N’imaginez pas un film d’action ou de sensations fortes. Le film s’articule comme un huis clos nocturne. Autour d’un feu de camp, en pleine forêt, deux membres de la bande à Fasel font face à trois jeunes militantes masquées, anonymes, actuellement engagées dans des collectifs comme la ZAD ou Extinction Rébellion. À l'écran, ils échangent, se confrontent sur leurs actions, leurs aspirations et leur vision de la révolution.
Puisque si leurs méthodes diffèrent, ces deux générations partagent un même esprit militant et anticapitaliste. Pour Laura Cazador, en tout cas, le parallèle s’est imposé naturellement : "Ce sont des individus qui ont eu ce besoin oppressant de se dresser physiquement contre le système. Et il nous paraissait intéressant d'analyser l'évolution de cette révolte. La manière de la vivre dans les années 70 et la manière de la vivre aujourd’hui."
"Les jeunes ont plus à nous apprendre"
Tourné en trois nuits, Autour du Feu se veut donc un espace de dialogue plutôt qu’une reconstitution des exploits criminels de la Bande à Fasel. "Le thème principal, c’est la révolte", précise Laura Cazador. "Le feu de camp, la nuit et la forêt favorisent la confession libre et sincère. Nous ne cherchions pas à dicter la parole des protagonistes, ni à donner des réponses. L'important était de susciter un débat."
Jacques Fasel admet avoir été marqué par cette rencontre : "Au début, je pensais leur transmettre des outils, jouer le rôle d'un mentor. Mais rapidement, j’ai compris qu’elles avaient beaucoup à nous apprendre. Là où nous avons sciemment fait usage de la violence, les jeunes militantes privilégient des actions collectives et pacifiques. "
Un film sur la révolte, pas sur des héros
Pour Jacques Fasel, le film sert aussi à mettre en lumière le rôle des "invisibles", " ces individus qui, en dehors des projecteurs, œuvrent pour faire avancer des causes sociales, environnementales ou politiques".
"A notre époque, nous avons accepté d’être médiatisés", confesse-t-il. "De devenir des figures du spectacle, comme un jeu, en quelque sorte. Alors que la lutte n'a rien d'un spectacle. Il y a beaucoup de gens, jeunes, moins jeunes, qui travaillent chaque jour dans l'ombre. Et elles sont tout aussi importantes."
Film encore en tournée
« Autour du Feu », documentaire de Laura Cazador et Amanda Cortès, sera encore projeté en Valais ces prochains jours, en présence des cinéastes. Mardi 21 janvier à Martigny, et jeudi 23 janvier à Monthey.