Girardin: l'avocat demande l'acquittement
Le procureur requiert une peine de quinze mois avec sursis
Le procès de l'ex-municipal Lionel Girardin s'est achevé mercredi au Tribunal d'arrondissement de Vevey. Le Ministère public a requis une peine de 15 mois de privation de liberté avec sursis et 60 jours amendes pendant deux ans. La défense a plaidé l'acquittement.
Pour le Parquet, "si Lionel Girardin avait été capable de reconnaître qu'il n'avait pas fait tout juste, une peine pécuniaire aurait été requise", a relevé le procureur Christian Buffat dans son réquisitoire. Mais il s'agit visiblement de quelqu'un qui a besoin d'un message, a-t-il ajouté.
Le Ministère public a ainsi estimé que les infractions de gestion déloyale des intérêts publics, subsidiairement gestion déloyale avaient été réalisées par le prévenu. Ce "président trop impliqué, dirigeant tout et n'importe quoi a pris le risque d'une liaison dangereuse", a notamment déclaré le procureur.
Concernant l'attribution d'un mandat à la société Operation Project (OP), dont Lionel Girardin était associé-gérant, le recours à un prestataire externe n'a en soi rien de critiquable et n'est pas illégal en soi, souligne-t-il. "Ce qui l'est, c'est qu'il n'y a pas eu d'appel d'offres externe."
Comme l'a montré le témoignage de l'analyste financier interrogé mardi, "le simple fait de ne pas appliquer le principe de bonne gouvernance nourrit le soupçon d'irrégularité", résume-t-il.
Surtout que le coût de l'externalisation des ressources humaines était relativement élevé: les prestations de sa femme étaient facturées 180 francs de l'heure et le coût annuel de la gestion RH par employé est passé de 315 francs en 2013 à 1708 francs en 2017.
Et d'égrener d'autres défaillances: cadeau de trois mois de loyer, surveillance de travaux de rénovation facturés à un prix trop élevé, coworking déficitaire, location de locaux non indispensables et gestion de cette activité qui aurait pu être assumée à l'interne.
Ce qui est affligeant, c'est que M. Girardin ne voit pas le problème. Avec son intelligence et son bagage, "le côté incestueux de tout ce micmac n'a pas pu lui échapper". Surtout avec sa qualité de municipal, a relevé M. Buffat.
Selon l'analyste financier, le préjudice et manque à gagner subi par la Fondation Apollo s'élèverait à 126'000 francs. Le procureur dit l'avoir ramené au minimum du minimum: un enrichissement illégitime de 74'000 francs pour avoir favorisé sa propre société et une perte de 90'000 francs pour la Fondation Apollo. "On ne force donc pas le trait".
L'avocat Ludovic Tirelli a d'emblée demandé l'acquittement de son client. "Il manque l'intention coupable", requise pour qu'il y ait gestion déloyale, a-t-il souligné. Son client n'a jamais eu l'intention de porter atteinte à la Fondation Apollo, "son bébé", pour lequel il s'est fortement impliqué. Il y a eu aucun dommage, ni à la fondation, ni aux intérêts de la collectivité, a-t-il martelé.
Au sein de la fondation, l'ex-élu avait "un rôle qui allait bien au-delà de celui d'un président". Il était actif dans l'opérationnel "au vu et au su de tous", rapporte la défense. S'il s'est attribué des mandats, il a fourni des prestations en retour et et a obtenu de bons résultats.
Les membres du Conseil de fondation (un directeur de banque, un notaire et un directeur des finances de la Ville de Vevey) savaient, quoi qu'ils aient prétendu par la suite, a-t-il souligné, procès-verbaux à l'appui. Notamment qu'OP était la société de Lionel Girardin, que les ressources humaines lui avaient été déléguées et que sa femme y travaillait et qu'il y avait possible conflit d'intérêt.
Ludovic Tirelli a estimé que les membres du conseil étaient revenus sur leurs propos lors de l'enquête, craignant d'être entraînés dans le battage médiatique. L'avocat s'est aussi inscrit en faux contre les calculs du "super analyste financier" qu'il a démontés un par un. Il a notamment démontré que les tarifs pratiqués par OP correspondaient à ceux du marché.
Par ailleurs, la Fondation Apollo était bénéficiaire quand elle a été reprise par le Relais. Elle n'a explosé en vol que parce que son président a été médiatisé, pas parce qu'elle n'avait plus de ressources.
Accusant la presse de tous les maux, M. Tirelli a demandé à la justice d'innocenter un présumé coupable, un homme "brisé", déjà condamné par l'opinion publique.
Exclu du Parti socialiste, le politicien de 47 ans ne siège plus à la Municipalité de Vevey depuis juin 2018. Présents au procès, les représentants de la Ville estiment avoir souffert d'un gros dégât d'image et ont fait état de prétentions civiles. L'Etat de Vaud qui a aussi versé des contributions importantes à la Fondation Apollo y a renoncé.
La justice rendra son verdict mardi à 9h00.