Avec la fusion des laiteries, Bagnes va perdre deux fromages à raclette
La fusion des laiteries d’Etiez, de Champsec et de Lourtier fera logiquement disparaître les fromages à raclette AOP Bagnes 25 et Bagnes 30. Une perte de diversité ? Non, répondent les porteurs du projet.
Bientôt deux fromages à raclette en moins à Bagnes. La récente fusion des laiteries de Champsec et de Lourtier avec celle d’Etiez a pour conséquence la disparition, respectivement des fromages Bagnes 25 et Bagnes 30. Seule une petite production persistera durant l’été sur les alpages de Charmontane et Sarreyer. «Les producteurs aimeraient garder la fabrication à la laiterie de Lourtier d’un fromage d’été. Le Bagnes 30 restera sur le marché mais en moins grande quantité », rassure Alain Frossard, président de la coopérative d’Etiez.
«Les caractéristiques des fromages sont désormais moins liées au fourrage.»
Alain Frossard, président de la coopérative d’Etiez
Toutes les autres meules porteront le numéro d’Etiez, le nonante-huit. Ce chiffre est le fruit d’une fusion en 1998 entre les laiteries de Sembrancher, Vollège et Le Levron. Si ces matricules – que certains passionnés connaissent sur le bout des doigts – sont aujourd’hui encore une marque de fabrique, ils ont perdu peu à peu de leur importance. «A l’époque, chaque village avait ses propres fourrages. C’est ce qui donnait le goût des différents fromages », explique Alain Frossard. «Mais actuellement, toutes les exploitations sont plus grandes. Des agriculteurs de Vollèges vont à Lourtier, des gens de Lourtier font les foins en plaine. Les caractéristiques des fromages sont désormais moins liées au fourrage.» Mais pas question pour autant de remettre en cause l’existence même de ces numéros. «Le numéro rappelle l’histoire du fromage», s’exclame Alain Frossard.
Une question de survie
La nouvelle laiterie d’Etiez, qui pourra accueillir la transformation de 2,5 millions de kilos de lait par an, devrait être opérationnelle à l’automne 2023. Les producteurs de Lourtier et de Champsec reconnaissent que ce déplacement à Etiez fera perdre une certaine diversité. «J’ai un pincement au cœur d’arrêter une production qui existe depuis plusieurs générations», reconnaît Adrien Fellay, président du consortage de la laiterie de Champsec. Mais cette nostalgie fait vite place à la nécessité de ce rapprochement. Une question de survie même. «Dans notre laiterie, on a beaucoup d’agriculteurs qui arrivent à l’âge de la retraite ou qui n’ont pas de repreneurs. Il fallait trouver une solution pour les exploitants à plein temps. On vient sur Etiez pour pérenniser nos exploitations agricoles », explique simplement Adrien Fellay. Son homologue d’Etiez, Alain Frossard, abonde :«Lourtier et Champsec ont beaucoup d’ouvriers-paysans. Ces gens-là font deux professions avec des journées qui se terminent à 22 heures.»
«En vingt ans, la vente directe a été multipliée par dix»
Alain Frossard, président de la coopérative d’Etiez
Parmi les autres points forts de cette fusion : la vente directe. La laiterie d’Etiez, située sur la route entre Sembrancher et Verbier, voit passer quotidiennement dix mille voitures par jour en moyenne. «En vingt ans, la vente directe a été multipliée par dix », se réjouit Alain Frossard. «Les gens du coin jouent beaucoup le jeu et les touristes aiment acheter leurs produits directement à la fromagerie.» De leurs côtés, Champsec et Lourtier, situés en fond de vallée et hors d’un tracé touristique, ne bénéficient pas du même engouement pour la vente directe. «Quand on voit les chiffres de la vente directe à Etiez, ça fait envie de se rapprocher d’eux,» conclut Adrien Fellay.