Portrait du mois : Sybille Blanjean la rideuse perfectionniste

Hugo Da Custodia
Journaliste RP

Deux Suissesses sont engagées sur le Freeride World Tour cette année. Elisabeth Gerritzen, la lauréate de l’an dernier et la rookie Sybille Blanjean. Notre portrait du mois est consacré à cette dernière.

Ce qui frappe d’entrée chez Sybille Blanjean, comme chez d’autres jeunes rideuses ou rideurs rencontrés précédemment, c’est qu’ils n’ont plus le poids d’être des pionniers. Contrairement à leurs prédécesseurs, qui inventaient quasiment leur sport au gré de la pratique, les nouveaux talents ont toujours baigné dans le freeride. Ils n’ont pas eu besoin de s’affranchir des codes, ils sont peut-être moins perçus comme des rebelles par rapport aux origines.

« À l’âge de 12 ans j’ai dû faire un choix. Avec mes amies on a basculé dans le freeride. » Sybille Blanjean

Les rookies ont déjà une sacrée expérience car des écoles de freeride existent et les compétitions sont ouvertes à des jeunes de plus en plus jeunes. Sybille Blanjean entre dans cette catégorie. Son seul pas de côté ? Sortir des pistes balisées et du cadre strict du ski alpin. « À l’âge de 12 ans j’ai dû faire un choix, explique-t-elle. J’avais la possibilité de poursuivre chez Ski Valais mais en même temps une structure de freeride s’ouvrait à Verbier. Avec mes amies on a basculé dans la deuxième option. » Ce choix personnel est aussi un choix de groupe. Notion très importante dans ce sport extrême. « Tout mon entourage fait du freeride, précise-t-elle. D’ailleurs dans mon groupe, certaines filles ont un niveau incroyable. Simplement, la compétition, ce n’est pas leur truc. »

Petits échecs, grands succès

À 22 ans, Sybille Blanjean peut se targuer d’avoir un joli palmarès. Championne suisse juniors puis vice-championne d’Europe en 2018, elle s’est ensuite mesurée a des athlètes plus âgés sur le Qualifier avant de franchir la dernière étape et d’arriver sur le Freeride World Tour cette année.

« Gentiment j’ai pris de la confiance puis les podiums sont arrivés. » Sybille Blanjean

Avec à chaque fois, du progrès dans sa pratique et une légitimité à conquérir. « Lors de ma première compétition en juniors c’était la cata, explique la rideuse de Verbier. Je me suis perdue. Gentiment j’ai pris de la confiance puis les podiums sont arrivés. C’était pareil lors du Qualifier, avec une première saison très compliquée. J’ai dû m’adapter à un niveau d’exigence très différent mais une nouvelle fois j’ai pu progresser pour atteindre finalement le Tour. »

Perfectionnisme 

« Mais qu’est-ce que je fais là… » Sybille Blanjean s'est répété cette phrase à maintes reprises. Lors de ses premières, à tous les étages. Cela dénote parfois un manque de confiance mais aussi une perpétuelle remise en question dans la quête du run parfait. « Quand j’analyse mon ski ou quand je viens à me critiquer, j’ai beaucoup de peine à m’attribuer des points positifs. C’est mon côté perfectionniste. Je sais que je peux toujours faire mieux, notamment en observant les autres rideurs. C’est pour ça que je me dis souvent ‘mais qu’est-ce que je fais là’. »

« Quand j’analyse mon ski ou quand je viens à me critiquer, j’ai beaucoup de peine à m’attribuer des points positifs. » Sybille Blanjean

Avec sa 6ème place au classement général après trois étapes du FWT, Sybille Blanjean sait désormais ce qu’elle fait là. Elle qui fait partie des meilleures skieuses freeride de la planète.

Transformer la peur

La progression de Sybille Blanjean n’est pas – on pourrait dire jamais – terminée. D’ailleurs comment fait-elle pour s’améliorer encore dans ce sport extrême ? « Il y a plusieurs étapes, détaille la Verbiéraine. Trois mois avant la saison, je commence le travail physique. Mais les squats ne font pas tout. Ensuite, j’aime bien retravailler la technique sur les skis de slalom. Et après, il y a le mental. Il faut oser se lancer, oser sauter plus haut. Tous ces aspects sont complémentaires. »

« Quand je saute, même en écoutant de la musique, tout s’efface dans ma tête. Le reste autour n’existe pas. » Sybille Blanjean

Et pour oser, Sybille Blanjean essaie de s’approcher de cette limite subtile imposée par son cerveau, sans jamais la dépasser. « Il y a de la peur concède-t-elle. Mais je dirais plutôt que c’est de l’adrénaline. Cela se transforme en quelque chose de positif. Quand je saute, même en écoutant de la musique, tout s’efface dans ma tête. Le ride est en soi un moment dans le présent. Le reste autour n’existe pas. » Seule au monde, dans un moment d’euphorie et de puissance, Sybille Blanjean pose ses runs sur les faces les plus exigeantes du circuit. Elle rêve un jour de s’imposer sur le Bec des Rosses, son point culminant à elle, chez elle à Verbier.

Retrouvez ci-dessous en podcast, d’autre extraits de l’interview de Sybille Blanjean

HDC
Thèmes liés à l'article
Catégories