José Gonzalez Dantas, cela fait plus de deux ans que vous êtes entraîneur à Troistorrents. Si on se replonge dans les tous premiers jours de votre arrivée, qu’est-ce qui vous revient ?
Je me rappelle que Fabrice Miserez, le président, est venu me chercher à l’aéroport. Je devais faire une quarantaine de dix jours. Sur la route, il m’a montré Monthey, Troistorrents et les différentes installations. Au début c’était un choc. Pour être honnête j’avais connu d’autres situations bien différentes, avec des clubs qui disposaient de leur propre salle. Et ici, c’est une salle polyvalente, une salle de gym qui sert aux sociétés et à l’école. Ce que je peux comprendre au vu de la taille de la région et du club. C’était vraiment déroutant mais je me suis rapidement adapté.
« Je me suis retrouvé à devoir faire un puzzle chaque jour pour former un groupe. C’était de la folie ! » José Gonzalez Dantas
Et pendant deux mois vous avez d’abord dû comprendre le fonctionnement d’un petit club comme Troistorrents, n’est-ce pas ?
C’est clair. C’était très dur et encore une fois très différent de ce que j’avais connu auparavant. Dans mes précédentes expériences je n’avais pas à me soucier de savoir sur quelles joueuses je pourrais compter. Je me concentrais uniquement sur le basket. Et là, je me suis retrouvé à devoir faire un puzzle chaque jour pour former un groupe avec des éléments de notre club, des clubs partenaires, etc… J’ai dû changer mon approche au jour le jour. C’était de la folie ! Après ce temps d’adaptation, j’ai enfin compris comment ça fonctionnait.
Qu’est-ce qui a été le plus difficile à mettre en place après cette période initiale ?
Bonne question ! Le plus dur c’était de faire changer certaines routines de jeu, d’essayer d’apporter de nouvelles choses. Je voulais implémenter une philosophie de jeu, axée notamment sur le travail défensif. J’ai procédé par phases, avec d’abord un temps pour apprendre, ensuite un temps pour comprendre et enfin le moment de l’exécution. Ce processus était assez compliqué pour les joueuses.
Vous avez découvert le basket helvétique. Est-ce que vous pouvez dresser le profil générique d’une joueuse suisse ?
Je ne peux pas parler de manière générale. Certaines joueuses pensent beaucoup, peut-être même un peu trop. D’autres réfléchissent un peu moins mais elles compensent grâce à leur niveau physique. Je dois trouver une sorte d’équilibre entre ces différents profils.
« Dans un milieu semi-pro comme à Troistorrents, il faut faire preuve de souplesse. J’ai dû ravaler ma fierté quelques fois. » José Gonzalez Dantas
Par contre vous aviez déjà l’habitude de travailler avec un effectif composé de joueuses locales et de renforts venus de l’étranger…
C’est vrai. La différence c’est que j’avais l’habitude de coacher des joueuses professionnelles peu importe leur provenance. Ici, je dois composer avec des filles qui travaillent ou qui étudient. Même certaines qui paient ou qui perdent de l’argent pour jouer. Et ça c’est parfois un dilemme.
Comment est-ce vous gérez cette problématique ?
On fait avec ! J’ai pu surmonter certaines situations et dans d’autres cas de figure j’ai aussi montré un peu d’agacement. C’était nouveau pour moi. Dans un environnement 100% professionnel c’est plus facile de gérer les erreurs sportives ou extra-sportives. On applique une sanction et on passe à autre chose. Dans un milieu semi-pro, il faut faire preuve de souplesse, d’empathie. Certaines fois j’ai dû prendre beaucoup de recul pour analyser la situation. J’ai dû ravaler ma fierté et amorcer un dialogue avec telle ou telle joueuse. J’ai appris à être moins strict.
« C’est n’est pas un club professionnel, au sens structurel du terme mais au niveau humain tout le monde met la main à la pâte. » José Gonzalez Dantas
La vraie nouveauté pour vous, c’était donc de vous retrouver avec toutes ces casquettes : entraîneur, préparateur physique et en quelques sortes psychologue.
C’est un peu ça. Dans des structures plus grandes, le staff est beaucoup plus fourni. Il y a l’entraîneur principal, un ou plusieurs assistants. Ici je dois presque tout faire. Katia Clément, m’aide quand même beaucoup. J’ai aussi mes doutes et je cherche une autre opinion. Elle prend également ce rôle de relais auprès des joueuses parce qu’elle les connaît très bien.
Et qu’est-ce qui vous plait à Troistorrents ?
C’est vrai qu’on a parlé seulement des problèmes jusqu’ici (rires). Mais si j’ai renouvelé mon contrat c’est qu’il y a plein de choses positives. C’est n’est pas un club professionnel, au sens structurel du terme mais au niveau humain tout le monde met la main à la pâte. C’est une équipe spéciale. On se sent considéré ici et ce n’est pas le cas partout.
Le BBC Troistorrents est une grande famille, vous en faîtes partie…
Exactement. Je le ressens comme ça. Je suis le premier à dire aux joueuses, après une défaite ou une victoire, d’aller partager un moment avec le public et l’entourage du club. Ils sont très volontaires et nous apportent un soutien précieux. Il y a aussi la raclette après le match ! C’est magnifique.
Cet esprit familial, est-ce que vous l’aviez déjà expérimenté ailleurs ?
Dans les plus grands clubs où je suis passé, il n’y a rien de comparable. En revanche, lorsque j’ai travaillé à Bembibre en Espagne, c’était aussi spécial. Après chaque match il y avait des moments de partage. Cet esprit existait aussi.
Bon, on va parler un peu de cette finale de Coupe de Suisse. Elfic Fribourg c’est un autre monde…
C’est clairement un niveau au-dessus. Leurs trois étrangères sont meilleures, plus chères aussi. Et avec Marielle Giroud et Nancy Fora, Elfic dispose des meilleures joueuses suisses du championnat. C’est un 5 majeur très fort qui peut imprimer une intensité très élevée.
« Si on tient le score, la pression sera clairement sur Fribourg. » José Gonzalez Dantas
Qu’est-ce qui vous reste alors ? La magie de la Coupe ?
C’est le plus important. Les Fribourgeoises sont favorites mais sur un match tout est possible. Les gens d’ici me font d’ailleurs sentir que ce rendez-vous est très spécial. De plus, Elfic a déjà perdu des finales par le passé, contre Riva ou Winterthur. Nous devons croire en nos chances.
Et sur quoi ça va se jouer selon vous ?
Sur notre capacité à rester au contact. J’ai dit aux joueuses qu’elles devront être très solides en début de partie. Si on tient le score, la pression sera clairement sur Fribourg. Quoi qu’il en soit, je n’ai aucun doute que nos filles donneront tout dans ce match.
Après cette finale, il y aura une fin de saison à négocier au mieux. Est-ce que vous avez des craintes ou des attentes particulières ?
Il faut voir ce qui se passe dans cette finale. Si on gagne, cela pourrait générer un déclic mental et nous donner beaucoup de motivation pour la suite. Et en cas de défaite, il faudra simplement continuer de travailler pour arriver en bonne condition en play-off. On verra si avec ça on parvient à décrocher une autre finale cette saison.