Une journée pour réfléchir aux enjeux sécuritaires liés à l'eau en Valais et en Suisse
Comment anticiper les crises liées à l’eau, et les gérer au mieux au niveau de la sécurité ? La question était au cœur d’une journée de réflexion ce mercredi à Sierre, qui impliquait scientifiques et professionnels du domaine de la défense.
Les crises liées à l’eau pourraient s’accélérer, entre sécheresses, pénuries et infrastructures défaillantes. De cette hypothèse est née une journée d’échange, organisée ce mercredi à Sierre par la Stratégie eau Valais et armasuisse Sciences et technologie. Le but : évaluer les potentielles menaces en lien avec l'or bleu qui pèsent sur la Suisse, et les moyens que l'on peut convoquer pour minimiser leur impact sur les différents acteurs de la société.
Cette rencontre a impliqué, entre autres, des scientifiques et des professionnels du domaine militaire. Elle a permis à certains de se rencontrer, ou d'échanger davantage sur la thématique. "Il est essentiel de se connaître pour pouvoir anticiper, mais aussi réagir au mieux lorsque les crises sont là", a expliqué le divisionnaire Raynald Droz.
Celui qui dirige la division territoriale 1 en sait quelque chose : il était responsable de l’engagement de l’armée lors de la catastrophe de Blatten, en mai dernier. "Pour poser les différentes responsabilités, il y a un élément qui fonctionne plutôt bien en Suisse, c'est la confiance. Lorsque l'on se connaît, que l'on a confiance en son partenaire, 50% du chemin est déjà fait." L'eau est ainsi un bon thème pour se rencontrer. "Il est générique et l'on peut, à partir de celui-ci, travailler sur plusieurs autres problématiques - le terrorisme, la défense, par exemple - car souvent, les outils et les personnes impliquées sont les mêmes", éclaire le divisionnaire Raynald Droz.
Première rencontre du type
Cette journée était la première du type. Et elle s'est déroulée en Valais, seul canton qui dispose actuellement d'un délégué à l'eau. Une rencontre bienvenue, à la suite des nombreux défis liés à l’eau qui ont touché récemment le Valais, souligne Laurent Horvath, qui occupe la fonction. "Ce type d'échanges, avec différents niveaux et domaines, est une véritable boussole." Qui permet notamment de valider, voire d'orienter, les stratégies cantonales. "Nous n'avons pas de boule de cristal, nous allons tous à tâtons avec les rapides changements auxquels nous faisons face", pousuit-il.
Des modifications liées au changement du climat - le principal enjeu. Mais également en lien avec la situation internationale. Les différents niveaux doivent donc collaborer, ont appuyé divers intervenants, et écouter des professionnels, à même d'évaluer les risques de crise, et de savoir comment les gérer.
Anticiper les crises au lieu de réagir
Parmi eux, l'équipe de Quentin Ladetto, directeur du programme de prospective technologique d’armasuisse (Deftech). Son travail consiste notamment à prospecter les crises qui pourraient émerger et les moyens dont le pays dispose pour y faire face, grâce à la technologie. "Anticiper permet de se préparer, et sera toujours moins cher que d'être dans la réaction", explique-t-il.
Il s'agit donc d'imaginer différents scénarios, pour "voir venir". Mais comment, concrètement ? "Déjà grâce à l'imagination, c'est l'un des meilleurs outils dont nous disposons, en tant qu'être humain", sourit-il.
Des scénarios qui ne sont pas totalement rêvés pour autant. Son équipe et lui s'inspirent de situations passées bien réelles - comme Blatten, notamment, "même si personne n'avait pu imaginer l'ampleur de la catastrophe" -, puis mélangent ces informations avec le présent. En résultent des cas hypothétiques, mis sur pied avec différentes méthodologies.
Une task force fictive
Parfois, la fiction s'invite aussi autour de la table, afin d'illustrer les enjeux et potentiels problèmes. Fabien Girardin, spécialiste des technologies indépendant, était aussi présent à Sierre ce mercredi, pour présenter une méthode encore rarement utilisée en Suisse : le design fiction. "Il s'agit de rendre tangible des futurs possibles, pour élaborer des façons d'y répondre."
Des narratifs fictifs sont donc mis en place. Par exemple, celui d'une hypothétique sécheresse en 2032. "De là, nous avons imaginé BlueCorps, une task force demandée par la Confédération", décrit Fabien Girardin. Elle permettrait d'évaluer la coopération entre les différents domaines d'activité pour prendre en main cette situation.
Des moyens utiles pour prospecter, selon Quentin Ladetto. Ils permettent de se projeter, puisque nous avons besoin d'images pour cela. Mais aussi de créer un narratif, pour thématiser ces potentielles crises. "Elles sont hypothétiques et n'arriveront peut-être jamais", rassure le directeur du Deftech. Mais elles sont plausibles, et restent un bon outil de travail pour se préparer au mieux. "Même si l'essence d'une crise fait que l'on n'a pas pu anticiper à 100%", rappelle le divisionnaire Raynald Droz.
