Réponse à la présence des loups les patous protecteurs des moutons, jouent leur avenir en Anniviers
Les loups sont en Valais. Cette réalité est confirmée par le service cantonal de la chasse.
La conséquence est claire : les moutonniers en paient le prix. Soit en introduisant d’importantes mesures de protection, soit en comptant les victimes égorgées.
Sauf que le casse-tête ne se limite pas là : dans l’inventaire des mesures préconisées par la Confédération, l'une des plus efficaces devient aujourd'hui la plus décriée, bien plus encore que la présence du loup. C’est l’utilisation des patous : 56 sont actuellement enregistrés sur les alpages du Valais romand, majoritairement des bergers des Pyrénées, dans une moindre mesure des maremmano des Abruzzes. Tous sont "triés sur le volet" avec des règles très précises, portées par AGRIDEA (Association suisse pour le développement de l’agriculture et de l’espace rural), explique Christine Cavalera, biologiste chargée de l'aide à la protection des troupeaux au service valaisan de l'agriculture (interview ci-dessous).
Leur utilisation est d'ailleurs liée à une série de panneaux informant de la situation
Seulement voilà, si l'efficacité des patous est démontrée, sa cohabitation avec "une espèce" en particulier est plus controversée. On parle ici des randonneurs ou des touristes qui arpentent les sentiers pédestres.
Avec ou sans patou, le résultat change du tout au tout
En Anniviers, la situation devient compliquée. D'abord - et c'est un fait - "on y compte entre 7 et 12 loups avec une présence que l'on peut qualifier de permanente", constate Yvon Crettenand, biologiste au service de la chasse (interview ci-dessous).
Ensuite parce que l'an passé, le tribut payé a été important, en particulier à l'alpage de la Lé où en trois semaines d'août, 36 moutons ont été égorgés… "Pourtant ils étaient gardés dans un grand parc et j'ai toujours suivi les recommandations de l'Etat", regrette Edith Wirz qui a particulièrement mal vécu cet estivage. Bergère depuis 22 ans à la Lé, elle a jeté l'éponge, laissé une partie de sa santé et de nombreux souvenirs : "Les 20 premières années, c'était le paradis… ensuite, ça a tourné à l'enfer", précise-t-elle, encore bouleversée par ces événements (interview ci-dessous).
En face, sur l'alpage d'Arpitettaz, Magdalena Vicente, bergère, a choisi une autre option avec les propriétaires des 800 moutons qu'elle doit surveiller. Aux côtés de ses deux Border Collie, la moutonnière a intégré trois patous au troupeau dont elle s'occupe. Efficacité : 100% jusqu'ici. "C'est clairement plus de travail pour les bergers mais une fois intégré au troupeau dans lequel il va vivre, il le protège dès qu'il y a quelque chose qu'il pressent comme un danger et va courir en aboyant pour dissuader…Toute la difficulté de la chose,… c'est que le patou ne va pas faire la différence pour un touriste" (interview ci-dessous).
Les plaintes de promeneurs inquiètent : pour la commune, le tourisme doux est en jeu
En Anniviers, trois alpages sont surveillés par des patous. Au Lyrec, ils sont deux mais la situation est sensiblement moins tendue : les sentiers ne traversent pas les pâturages où les propriétaires ont d'ailleurs construits des parcs électrifiés de 105 à 120cm de haut. Il y a ensuite le troupeau de 800 bêtes conduit par Magdalena Valencia qui après avoir "nettoyé" l'alpage de Singlinaz traverse sur l'Arpitettaz avec ses cinq chiens.
Le problème, c'est que cet alpage est traversé par les chemins des cabanes, en lacets et sur une bonne partie des surfaces exploitées.
"Les bergers y font d'énormes efforts avec les mesures de protection et il est clair qu'ils y assurent un travail remarquable… ils entretiennent le terrain et limitent ainsi les risques d'avalanches… mais avec les touristes, on marche sur des œufs ", constate Vincent Theytaz, conseiller communal en charge du dossier qui écope des plaint4es qui s'accumulent sur son bureau. (interview ci-dessous).
Du coup, il va falloir arbitrer. Les éleveurs et les bergers ont été rencontrés et entendus. Et ces prochaines semaines seront décisives. "Ce qui n'est plus admissible aujourd'hui pour cet été 2020, c'est d'avoir des promeneurs qui reviennent d'un chemin qui mène à une cabane et qui nous témoignent qu'ils ont été approchés par des chiens agressifs", relève Vincent Theytaz. Conclusion : "Des mesures ont été mises en place pour garantir la maîtrise des chiens de protection, des mesures obligatoires… Et si elles ne peuvent pas être respectées, au moindre incident, nous allons demander de retirer les patous cet été".
L'ultimatum est posé : les prochaines semaines seront donc décisives pour laisser ou non un droit de cité aux patous d'Anniviers. Entre-temps, des panneaux d’information viendront compléter ceux qui y sont déjà installés pour annoncer la présence de patous sur les itinéraires pédestres.
"Normalement avant de faire une ballade, il serait bon d'aller sur swissmobile (ou swiss-rando) ou vous avez une carte avec la localisation des alpages avec des chiens de protection. Entre-temps, des panneaux d’information viendront compléter ceux qui y sont déjà installés pour annoncer la présence de patous sur les itinéraires pédestres.
Actuellement, sur 500km de sentiers pédestres en Anniviers, 12 traversent des espaces surveillés par des patous, des alpages qui jusqu'ici, n'ont pas eu à compter les cadavres de moutons boulottés par les loups.