Les sautes d'humeur du printemps peuvent-elles nous éviter un été trop sec?
Temps maussade, pluies diluviennes et rayons de soleil. La météo de ces dernières semaines joue les montagnes russes. Mais les fantaisies météorologiques du printemps peuvent-elles nous éviter une sécheresse estivale ? On fait le point.

«J’en ai marre, il pleut tout le temps». Cette rengaine, on peut l'entendre régulièrement ces derniers jours, que ce soit à table, en faisant ses courses ou lors d’une discussion entre amis. En cause, une météo qui joue les montagnes russes depuis quelques semaines maintenant.
Les mois de mars et d’avril ont d'ailleurs vu leur lot de pluies s’abattre un peu partout en Suisse. Le Valais a connu des précipitations particulièrement nombreuses en mars, à tel point que par endroits, il est tombé 200 à 250% des précipitations de la norme 1991-2020 selon Meteonews. Du jamais vu, diront certains.
"Des étés avant l'heure"
Mais la météo est-elle vraiment aussi maussade qu’il n’y paraît ? Pas vraiment, selon Frédéric Glassey, directeur de la météorologie chez Meteonews. Après tout, ces pluies abondantes ne font pas de ce printemps une saison anormalement humide. En réalité, c’est tout l’inverse. "On a été habitué de manière assez régulière ces dernières années à vivre des étés avant l’heure. Des grosses chaleurs déjà en mars, en avril. Ça c’était anormal", explique Frédéric Glassey. Ce printemps humide ne sort donc pas de l’ordinaire.
"Dans le Chablais et en Valais central, la nappe s’est bien régénérée. Mais dans le Haut-Valais, il y a encore un déficit."Pierre Christe, Chef du groupe Eaux souterraines au SEN
Et puis, ces précipitations n’apportent pas que leur lot de grimaces. Certes, le manque de vitamine D que procure le soleil à d’autres occasions peut jouer sur les nerfs de bon nombre de personnes. Il reste que l’or bleu tombé du ciel a permis de remplir les nappes phréatiques du canton. Un bon signe pour l'été à venir.
"Dans la portion du Chablais et du Valais central, la nappe s’est passablement bien régénérée ces dernières semaines. Mais le Haut-Valais reste encore relativement déficitaire par rapport aux statistiques des mesures", informe Pierre Christe, en charge des eaux souterraines au Service de l’environnement du canton du Valais (SEN).
Un écosystème qui peut respirer
Et d’ajouter que deux tiers des stations de mesures de la Plaine du Rhône ont retrouvé des niveaux dans la norme de ces quarante dernières années. En altitude, le scénario est similaire à la plaine, si ce n’est que c’est sous forme de neige que les nuages se sont vidés.
Paradoxalement, cette neige arrive tard dans l’année. Mais là non plus, ce n'est pas une mauvaise chose: "Plus le stock de neige se reconstitue, plus on a de chances de voir ces volumes d'eau venir en partie compenser les pertes observées en début d'année", souligne Pierre Christe.
Mieux gérer les ressources
Cette neige ne servira d'ailleurs par qu'aux eaux souterraines du canton. Les cours d'eau et les lacs sont également concernés. De fait, c’est tout une région qui respire: les vergers, les alpages, les vignes du canton, etc.
La question de la gestion de cet or bleu lors d'une période de sécheresse se pose malgré tout. "Il y a de plus en plus de projets qui se développent dans le sens d'une irrigation rationnelle pour utiliser au mieux l'eau disponible", explique Christine Genolet-Leubin, cheffe du SEN.
Et d'ajouter qu'une stratégie a été mise en place entre le canton et les communes pour connaître notamment quelles sont les réserves en eau du canton, et de connaître les différentes manières de l'utiliser pour pouvoir planifier les projets d'avenir
Bonhomme d’hiver peu fiable
Du côté des prédictions pour la belle saison à venir justement, difficile de se prononcer aussi tôt. Le bonhomme d’hiver Böögg a Zurich a bien tenté d’user de sa boule de cristal. Résultat ? Un été morose en prédiction. Pourtant, l’été 2023 pourrait ne pas être aussi mauvais qu’il ne l’a prédit. Après tout, ses prédictions ne se sont avérées correctes que dans 37% des cas, selon Frédéric Glassey.
A l’inverse, les tendances saisonnières obtenues par Meteonews laissent présager un autre scénario. Même s’il ne s’agit que de prédictions fiables à 65%, selon Frédéric Glassey: "Ces tendances nous montrent un mois de mai qui va dans le prolongement du mois d’avril. Un mois de mai plutôt humide et frais donc. Et un mois de juin un peu plus chaud avec une tendance orageuse potentiellement plus forte".
Et pour la suite, d’un été plutôt beau et chaud. "Et donc relativement sec", ajoute le spécialiste de chez Meteonews. Mais là encore, rien n’est sûr. Seul le temps nous le confirmera.