Les peluches font déjà la loi à Evolène: bienvenue au plus long carnaval du canton
Alors que l’épiphanie vient de passer, les hostilités carnavalesques battent déjà leur plein à Evolène. Peluches, empaillés, masques sauvages, les traditions ancestrales commencent particulièrement tôt et font la réputation de l'événement.

C’est peut-être le plus long carnaval du canton, voire de Suisse. En tout cas, les gens du coin se plaisent à le dire. Le 6 janvier, ce sont les rois et l’épiphanie qui sont célébrés. Mais au fond du Val d’Hérens, le 6 janvier marque aussi le lancement du carnaval d’Evolène.
Calendrier à rallonge
A peine entrée dans la nouvelle année, la commune vibre déjà au rythme des soirées costumées et les peluches font la loi dans les rues. Ces créatures traditionnelles, vêtues de peaux de bêtes et arborant un masque animalier, toutes dents dehors, arpentent les rues du village en agitant leur cloche. Pour l’heure, elles ne sont de sortie que le weekend. Mais dès le 15 février, elles feront partie intégrante des festivités au village, jusqu’au mardi gras.
Alors pourquoi si tôt ? "Historiquement, le Carnaval a été casé entre deux fêtes chrétiennes: l'épiphanie et le début du carême", expose Florian Pannatier, ancien membre du comité du carnaval d’Evolène. "La plupart des organisations concentrent cette fête sur la semaine qui précède mardi gras. Mais ici la tradition et les habitants ont simplement prolongé l'événement sur toute la période."
La tradition perdure ainsi de génération en génération, sans que personne ne conteste la longueur des festivités. Florian Pannatier le concède toutefois, les informations précises sur cet héritage sont une denrée rare, puisqu’il existe peu de sources écrites. "Nous mêmes participons aux activités depuis notre enfance de manière naturelle, sans se poser de question", confesse-t-il. "Ce n'est qu'il y a une dizaine d'années que nous avons oeuvré pour recueillir les témoignages oraux et que nous avons entamé des recherches sur d'autres rassemblements similaires aux nôtres."
La peluche règne sur Evolène
Sur le site du carnaval sont ainsi rassemblées de précieuses informations, dont une description détaillée des figures typiques de la fête. La plus connue, la plus médiatisée et la plus bruyante, c'est sans doute celle de la peluche. Cette créature velue et féroce qui s'active dans un but: agiter sa cloche le plus fort possible, forcer les villageois à sortir de chez eux et chasser les esprits de l'hiver pour garantir un printemps prospère.
Sous ces attirails volumineux, souvent malodorants: des hommes et de plus en plus de femmes. Des enfants de la région, désireux de perpétuer la tradition. "Le cercle n'est pas fermé", explique Lucas Métrailler, membre du comité de carnaval, qui lui-même dispose d'un costume. "Généralement, on se lance entre amis. On récupère des peaux ou on en commande, on les sèche avant de les assembler sur une veste suffisamment solide. Reste ensuite à se fournir avec un masque en bois et une cloche de vache."
Le costume de Lucas Métrailler est entreposé dans une grange du village. Aux murs, des dizaines de peaux de bêtes sont suspendues. Du mouton, du chamois, mais aussi du renard, du bouc ou du blaireau. "On prend ce qu'on trouve", confesse Lucas Métrailler. Il raconte avoir déjà aperçu un chat sur un costume. "Mais c'est loin d'être courant."
Touristes surpris?
Les peluches prennent chaque weekend leur quartiers dans la commune. Ils seront bientôt rejoints par les empaillés, des personnages massifs, entassés dans des bottes de pailles, et les Marie, des hommes travestis à coup de jupe brodées et de foulards colorés.
De quoi surprendre, peut-être, les touristes venus skier dans la station, soudain nez à nez avec ce festival de monstres rustiques. "C'est vrai que si la médiatisation de l'événement n'est pas un but en soi, une certaine communication est nécessaire pour ne pas effrayer les visiteurs venus de loin", sourit Dylan Métrailler, ancien membre du comité, et directeur d’Evolène Région. "Mais les hébergeurs font très bien leur travail et il est rare que les touristes soient pris de court. Certains viennent même exprès pour ça."
Dylan Métrailler concède que ces traditions véhiculent aussi leur lot d'idées reçues. "Le plus souvent, cette image empreinte de sauvagerie nous est collée par les Valaisans des autres régions, plus que par des habitants d'autres cantons. Mais c'est aussi qu'on aime en jouer."
