La justice valaisanne doit revoir sa copie dans l'affaire d'un automobiliste
Le Tribunal fédéral admet le recours d'un automobiliste condamné après un accident à la sortie d'un tunnel. La justice valaisanne, qui est allée au-delà de la conclusion de l'expert sans motifs probants, devra rejuger l'affaire.
L'accident s'était produit le 21 mars 2014 vers 06h00 du matin. A l'intérieur d'un tunnel, le recourant s'était déporté sur la voie de dépassement afin de doubler un véhicule plus lent dans cette montée. A la sortie, il était entré en collision avec une voiture occupée par une femme et son compagnon, qui descendait en sens inverse.
L'automobile du recourant avait fait un tête-à-queue alors que l'autre voiture traversait les deux pistes montantes et tapait contre le mur du tunnel avant de s'arrêter dans celui-ci.
L'automobiliste avait été condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amendes à 100 francs avec sursis. Il avait été reconnu coupable de violation grave des règles de la circulation routière et lésions corporelles, par négligence dans les deux cas. Ce verdict du Tribunal des districts de Martigny et St-Maurice avait été confirmé en deuxième instance.
Dans un arrêt publié vendredi, le Tribunal fédéral casse cette décision et renvoie l'affaire à la justice valaisanne. Il estime que cette dernière a apprécié arbitrairement les preuves en considérant qu'une hypothèse présentée comme "vraisemblable" par l'expert était établie au-delà de tout doute raisonnable.
Dans son premier rapport fondé sur le constat et les photos de la gendarmerie, l'expert avait estimé que trois scénarios étaient possibles: le choc s'était produit sur la double ligne de sécurité ou sur l'une ou l'autre bordure de cette ligne.
Le compagnon de la conductrice impliquée avait ensuite produit des photos montrant les voitures après le dégagement des lieux. L'expert avait alors affiné les simulations et remis deux rapports complémentaires. Il estimait que le choc se situait sur la voie descendante, à environ 80 cm de la double ligne de sécurité. Il était donc vraisemblable que le recourant avait empiété sur la piste opposée.
Les juges cantonaux avaient privilégié cette dernière hypothèse. Ils avaient écarté l'avis d'un policier selon lequel il n'était pas exclu que la conductrice ait été déportée à gauche alors qu'elle sortait d'une courbe à droite. Ils avaient retenu en revanche la déclaration du compagnon qui était sûr que la conductrice était restée sur sa voie.
Pour la Cour des affaires pénales, l'instance précédente ne pouvait pas, sur ces bases, considérer comme certaine une conclusion que l'expert ne retenait pas au-delà de la vraisemblance. En outre, elle parlait de "choc frontal" dans son jugement, alors que le rapport complémentaire mentionnait un "frottement latéral".
Les juges de Mon Repos critiquent aussi l'affirmation selon laquelle les deux voitures auraient fait un tête-à-queue: en effet, les traces rectilignes du véhicule descendant démentaient formellement cette conception. Enfin, ils estiment que l'avis du compagnon, vu sa relation avec la conductrice, n'était pas suffisamment probant pour rendre certaine la conclusion de l'expert. (arrêt 6B_330/2020 du 6 octobre 2020)