Faux passeports dans le football: l'entraîneur valaisan Marc Chervaz installé au Sénégal témoigne
La semaine passée, l’équipe d’Irak des Moins de 16 ans s’est vu refuser la participation aux Championnat d’Asie.
La semaine passée, l’équipe d’Irak des Moins de 16 ans s’est vu refuser la participation aux Championnat d’Asie. La raison : certains joueurs étaient dotés de faux passeport et étaient en réalité âgés de 18 ans. Tricher sur son âge dans le football, une pratique qui n’est pas nouvelle. Si le cas de la semaine passée concernait l'Asie, l'Afrique est elle aussi touchée par cette problématique.
Marc Chervaz, entraîneur valaisan au Sénégal et témoin privilégié
Marc Chervaz vient de Collombey. Depuis plusieurs années, il est installé au Sénégal, entraîne au sein de l’Institut Diambars et occupe la fonction d’entraîneur-assistant de l’équipe du Sénégal des Moins de 17 ans. C’est assez fréquemment qu’il est confronté à la problématique de passeports modifiés avec de jeunes joueurs qui tentent de se rajeunir.
Quels intérêts pour les joueurs de se rajeunir?
Les intérêts sont multiples selon Marc Chervaz: "Un joueur qui se dit âgé de 20 ans au lieu de 23 par exemple, aura un temps d'acclimatation supplémentaire lorsqu'il débarque en Europe, dans un contexte totalement nouveau. De plus, sa valeur prend l'ascenseur sur le marché des transferts. Un très jeune joueur avec un grand potentiel vaudra plus cher qu'un joueur avec les mêmes qualités mais un peu plus vieux."
Le jeune joueur est souvent une "victime"
Marc Chervaz ne veut pas accabler les jeunes joueurs qui ont recours à une modification de leur âge sur leur passeport. "Un joueur africain qui réussit dans le football en Europe permet à 10, 15 familles de sortir de la pauvreté. Peut-on, dès lors, en vouloir au jeune footballeur? Pour moi, c'est un problème plus global. Il s'agit plutôt de montrer du doigt le rôle des agents, des clubs, des dirigeants dont leurs intentions ne sont pas toujours claires."
Des mesures sont mises en place pour éradiquer le phénomène
La FIFA, la Fédération africaine de football et les états tentent d'enrayer ce problème. "Le Sénégal est un très bon exemple sur le continent africain. De nombreuses personnes qui étaient dans les systèmes de modification d'âges de jeunes joueurs se trouvent derrière les barreaux, l'Etat a pris ça au sérieux. La délivrance des passeports n'est plus aussi facile que par le passé." L'Etat agit, la Fédération africaine de football également. Depuis peu, elle oblige tous les joueurs souhaitant participer au Championnat d'Afrique des Nations des moins de 17 ans à effectuer une radio déterminant le développement du cartilage de croissance. "On sait qu'un enfant termine sa croissance à 18 ans. Si le cartilage de croissance est encore présent, le jeune sera considéré comme ayant moins de 18 ans. Ce test appelé IRM n'est infaillible mais c'est celui qui a été retenu, qui coûte le moins cher et qui donne quand même le meilleur taux de réussite."
La crédibilité du football africain est en jeu
Marc Chervaz constate depuis plusieurs saisons au Sénégal une diminution du nombre de cas de joueurs qui tentent de tricher sur leur âge. Éradiquer cette problématique est une priorité pour la Fédération africaine de football dans le but de gagner en crédibilité. Et les enjeux sont importants. "Plus le football africain sera crédible, plus il y aura d'investisseurs. Et le football, aujourd'hui, c'est aussi des moyens. Par exemple au Sénégal, on compte deux à trois académies qui sont structurées comme en Europe. Trois, pour un pays de 14 millions d'habitants comme le Sénégal, forcément, c'est insuffisant. L'idée c'est qu'en crédibilisant le football africain cela donne envie à des investisseurs de venir au Sénégal et de permettre au football africain de se rapprocher des standards européens."