Du "lait équitable" à Vouvry: la brique payée 1 franc au producteur devient aussi valaisanne
Le lait labellisé «équitable» sera désormais aussi valaisan.
Le lait labellisé «équitable» sera désormais aussi valaisan. La famille Bonjean à Vouvry entre dans cette coopérative qui rémunère les producteurs 1 franc le litre. Démarré en septembre dernier, le concept cartonne: les producteurs ont vendu plus de cinq fois plus de volume qu'espéré.
Nous sommes à Vouvry, à quelques pas du Rhône. Ici, les terres sont plutôt humides, bonnes pour produire de l'herbe: de l'herbe pour nourrir des vaches laitières par exemple. Derrière leur ordinateur, père et fils Bonjean vérifient les données de l'exploitation. On peut ainsi suivre la production de lait de Gothard, Jimena ou Kali. Romain connait le nom de toutes ses vaches par cœur. «Presque toutes», rectifie-t-il. Au détour d’un conversation, il avoue ne pas se sentir très bien lorsque l'une d'elle doit partir à l'abattoir parce que trop vieille ou plus assez productive. Il préfère laisser son père s’en occuper.
«C’est un geste militant»
Sur une année, il produit 600'000 litres de lait. Pour l'instant, seuls 20'000 litres partent pour la coopérative. Ça lui fait un revenu de 7'000 francs, mais lui n’a pas choisi de participer au projet pour des raisons financières. «C’est surtout un geste militant, revendique le fils du président de la Fédération laitière valaisanne. Lorsqu’on nous a approché, j’ai vu cela comme une opportunité de promouvoir l’agriculture suisse en général.»
Romain Bonjean n'est pas un adepte de permaculture et son lait n'est pas étiquetté bio. Mais il a à cœur de remplir les exigences du label «Lait équitable». «Il y a quelques règles à suivre. Par exemple les vaches doivent pouvoir sortir régulièrement en plain air. Elles ne doivent pas non plus être attachées. Il faut également respecter les PER, c’est à dire les prestations écologiques requises: des normes pour les phythosanitaires par exemple.» Des critères peu contraignants, selon l’agriculteur, puisqu’il s’agit de réglementations fédérales qu’il met déjà en application dans son quotidien.
«Il y avait urgence»
Le programme de «Lait équitable» n’est pourtant pas uniquement présent sur notre territoire. Le concept existe aussi au Luxembourg, en France, en Belgique, en Autriche, en Allemagne, en Italie. En Suisse, c'est pour faire suite aux grèves du lait de 2009 que le concept est né. Comme ces manifestations n'avaient pas changé la condition des producteurs et productrices et que les prix avaient toujours tendance à tirer vers le bas, «il y avait urgence», selon Anne Chenevard, agricultrice à Corcelles-le-Jorat et Présidente de la coopérative. En trois mois, c’était près de 200’000 litres qui ont été écoulé, soit le volume de vente attendu pour une année.
La brique équitable est distribuée dans tous les Manor Food et Aligro, mais aussi dans bon nombre de petites épiceries locales. Le lait qu'on trouve sur le canton ne provient pourtant pas uniquement de l'exploitation de Romain Bonjean: c'est impossible, nous explique Anne Chenevard. «Techniquement parlant, nous ne pouvons pas avoir une cuve chez Cremo réservée pour la cooopérative. C’est donc mélangé avec le lait des autres producteurs. Par contre, lorsque qu’un consommateur achète sous le label «équitable», il sait que que quelque part en Suisse, un producteur sera payé correctement pour sa production. C’est un achat solidaire.»
Pour l'instant, la ferme des Bonjean est la seule valaisanne à participer au projet, mais trois autres pourraient bien rejoindre la quarantaine de producteurs de la coopérative d'ici 2021.