Des troupes romaines ont laissé des traces en altitude en Valais
Des fouilles archéologiques ont montré la présence de troupes romaines à plus de 2600 mètres d'altitude en Anniviers et en Entremont. Elles feront bientôt l'objet de publications scientifiques et un sentier didactique sera inauguré à Liddes fin août.

Les troupes romaines ont occupé plusieurs sites en Valais et dans le val d'Aoste (I). En haute altitude, les archéologues ont notamment investigué la face sud du Toûno, montagne qui surplombe le village de St-Luc, dans le val d'Anniviers.
Le site, connu de quelques rares locaux, n'avait jamais été étudié dans le cadre d'un projet au bénéfice d'un mandat scientifique de l'Office cantonal d'archéologie. "Entre 2021 et 2023, nous avons mené plusieurs campagnes d'investigation", précise à Keystone-ATS l'archéologue Tristan Allegro, encore étudiant à l'époque et qui a fait du site du Toûno le coeur de son mémoire de master.
Clous de chaussures
Ce qu'il découvre avec son équipe, à plus de 2760 mètres d'altitude, atteste d'une présence de soldats romains, comme ces empreintes au sol laissées par cinquante abris callés par des pierres. Sans doute des tentes en peau d'animal ou en toile qui, au vu de leur nombre et des vestiges trouvés sur place, ne sont pas reliées à une activité pastorale, à la chasse ou à l'exploitation minière alors courante dans la région, relève Tristan Allegro.
Et puis il y a ces objets qu'il est possible de dater entre 50 et 20 avant J.-C.: une pointe de javeline (arme de jet), quelques clous de chaussures romaines, des pièces de monnaie, des fragments d'un plat en céramique, une fibule ou encore des outils.
"Les soldats ont probablement bivouaqué dans le cadre d'une opération militaire, peut-être liée aux guerres opposant l'Empire romain à la vallée d'Aoste", note Tristan Allegro. La faible quantité de vestiges, les conditions météorologiques en haute altitude, ainsi que le manque de ressources en bois ou en eau, appuient l'hypothèse d'un bivouac temporaire.
Muraille en ruine
Les vestiges retrouvés au Toûno sont similaires à ceux découverts sur d'autres sites d'altitude. Le plus étudié est le Mur (dit) d'Hannibal dans le val d'Entremont, investigué entre 2006 et 2016.
Il présente une imposante muraille en ruine de 270 mètres de long, qui protégeait des abris et des cabanes vers 29 av. J.-C. "Des militaires au service de Rome ont tenu cette fortification probablement pendant une à plusieurs saisons", explique Romain Andenmatten, archéologue qui connaît les lieux comme sa poche, et en a fait à l'époque le sujet de son mémoire, puis de sa thèse de doctorat.
On recense notamment les fondations au sol d'une quarantaine de cabanes, et une cinquantaine d'abris plus sommaires. "On présume aujourd’hui qu’entre 225 et 400 personnes ont pu séjourner simultanément sur le site".
A noter qu'Hannibal, général carthaginois qui a franchi les Alpes plus au sud avec son armée et ses éléphants en 218 av. J.-C , n'a rien à voir avec le site. "Mais son nom est souvent donné à des ruines ou des passages alpins", note Romain Andenmatten, également responsable scientifique de l'association RAMHA (Recherches archéologiques du Mur (dit) d'Hannibal).
Graines et fruits
Tristan Allegro prépare pour 2025 une publication scientifique sur les résultats des travaux pluridisciplinaires menés au Toûno. Quant aux recherches menées dans le val d'Entremont, elles feront l'objet prochainement d'une monographie à laquelle travaillent depuis huit ans une quinzaine d'archéologues et d'autres spécialistes dont des épigraphistes, des archéozoologues, des carpologues et des palynologues, étudiant respectivement les inscriptions, les ossements d'animaux, les graines et fruits, les pollens.
Parallèlement, l'association RAMHA, qui soutient le projet avec l'Office cantonal d'archéologie, inaugurera le 31 août prochain un sentier didactique, avec panneaux et bornes numérotées. Depuis Liddes, Bourg-St-Pierre ou la cabane de Mille, il emmènera les randonneurs à la découverte "responsable et respectueuse" du Mur (dit) d'Hannibal.
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