Stefan Blättler après plus de 100 jours au MPC: "ça fonctionne"
La guerre en Ukraine illustre une des quatre priorités que le nouveau procureur de la Confédération a définies après plus de 100 jours en poste. Après des années de problèmes, puis un long interim, le MPC fonctionne bien, a dit Stefan Blättler devant les médias.
A la tête du Ministère public de la Confédération (MPC) depuis le 1er janvier, l'ancien commandant de la police bernoise âgé de 62 ans veut travailler dans la réactivité et les réseaux. Pour preuve, la rapide création d'une task force afin de réagir avec compétence à la guerre en Ukraine, en s'assurant que tous les réfugiés arrivant en Suisse sont sans reproche sur ce plan ou que personne ne contourne les sanctions.
La poursuite des crimes de guerre ou contre l'humanité fait partie d'une des compétences du MPC et Stefan Blättler voulait en faire une de ses priorités déjà avant le 24 février, a-t-il dit vendredi devant les médias. "Nous avons un devoir dans ce domaine, ne serait-ce que parce que la Suisse est dépositaire des conventions internationales (de Genève)".
Les procédures sont souvent longues et complexes. Et M. Blättler de citer l'exemple du militaire libérien récemment jugé à Bellinzone après 20 ans.
Les procédures d'entraide judiciaire en sont souvent la cause. A cause de la pandémie ce fut encore plus difficile l'an dernier. C'est l'entraide qui le plus souffert du Covid, a dit le procureur adjoint Jacques Rayroud. Mais grâce à la vidéoconférence notamment, le MPC a pu traiter 250 demandes de l'étranger et en a adressé 220 à d'autres pays en 2021, a-t-il précisé.
Autre priorité qui a donné beaucoup de travail au MPC, la lutte contre les organisations criminelles. Il faut dire que la Suisse est un pays attractif pour elles, selon le procureur. La plupart des chefs sont à l'étranger, en Italie surtout, ce qui implique une collaboration internationale et un travail en réseau. Stefan Blättler s'est déjà rendu deux fois en mars à Rome et à Milan.
Troisième priorité définie par le chef du MPC, la criminalité économique, avec la corruption internationale et le blanchiment. "Nous pouvons apporter notre contribution à une place financière suisse forte", a dit Stefan Blättler. Cette division est de loin la plus dotée en personnel du MPC, même si ce dernier n'est compétent que pour les cas graves. La collaboration avec les cantons est d'ailleurs essentielle.
La cybercriminalité fait partie de cette division qui dispose d'une équipe spécialisée depuis 2021. Le MPC doit en effet sans cesse s'adapter.
Ruedi Montanari, procureur adjoint, l'a relevé: pour bien des aspects il s'agirait de modifier la loi afin que le MPC se concentre sur les grosses affaires complexes ou internationales, mais abandonne aux cantons de petites affaires d'explosif ou de bagarres dans le train. Un avis partagé par M. Rayroud: "même si elle a subi un toilettage l'an dernier, il est nécessaire de réviser une loi désuète sur plusieurs aspects".
Le terrorisme, avec ses nombreuses facettes, représente la quatrième priorité du nouveau procureur. Là aussi "en collaboration avec les cantons, nous devons être pro-actifs et travailler en partenariat avec l'étranger. "Le terrorisme à motivation djihadiste reste un phénomène d'une actualité brûlante", a souligné déclaré M. Blättler devant les médias. La coopération interne et internationale est importante à cet égard.
Dans un Ministère public de la Confédération qui a connu des années difficiles, Stefan Blättler a trouvé une "équipe qui fonctionne, bien motivée et qualifiée". Elle est nouvellement organisée avec de nouvelles exigences, mais il est indispensable de continuer sans cesse à s'adapter, avec souplesse et en recourant aux compétences là où elles sont, à l'intérieur ou à l'extérieur du MPC, avec les cantons ou les homologues à l'étranger.
Le procureur de la Confédération ne voit pas la nécessité de réorganiser le Ministère public, à quelques réglages près dans la répartition interne du personnel par exemple. "Le passé n'est plus un sujet", a-t-il déclaré. Des rencontres informelles avec le chef de la FIFA Gianni Infantino avaient été fatales à l'ancien procureur général de la Confédération Michael Lauber. Il a quitté son poste au milieu de l'année 2020 sous la pression de l'opinion publique et du monde politique.
Stefan Blättler ne s'exprimera pas sur le passé, qui ne l'intéresse pas, et veut regarder vers l'avenir, a-t-il souligné à plusieurs reprises vendredi. Sur le passé tout au plus a-t-il tenu à mettre hors de cause ses deux adjoints, Jacques Rayroud et Ruedi Montanari, présents à ses côtés.
Ceux-ci travaillaient déjà sous Lauber et ont dirigé le Ministère public de la Confédération par intérim pendant un an et demi après son départ. "Ils ont bien fait leur travail", a déclaré M. Blätter. Le rapport actuel de l'autorité de surveillance du Ministère public de la Confédération (AS-MPC) le montre également.