La police lausannoise a soutenu 131 victimes dans son espace neutre
Inédit en Suisse, l'espace neutre ouvert il y a un an par la police lausannoise a accueilli et soutenu 131 victimes de violences domestiques. Toutes ont bénéficié d'un suivi comprenant une analyse des risques et 20% d'entre elles ont bénéficié d'un suivi ultérieur afin de recevoir un soutien sur la durée.

"Ce n'est pas encore assez", a commenté mercredi devant les médias la cheffe de l'Unité spéciale pour la prise en charge des victimes, l'inspectrice principale Albane Bruigom. Elle a toutefois souligné les excellents retours sur cette nouvelle prise en charge. "La police, vous ne nous avez pas oubliées", entend-elle souvent de la part des victimes. Le local est par ailleurs très bien perçu, selon elle.
Selon les statistiques, 832 cas de violences domestiques ont été enregistrés à Lausanne en 2020, 820 en 2021, 748 en 2022. La création d'une telle Unité spéciale et d'un local neutre et convivial partait du principe que bon nombre de victimes ne se présentaient pas dans les postes de police traditionnels. Seuls 10% le font en général, selon les estimations de la police.
Entre le 1er juin 2022 et le 31 mai 2023, 131 personnes victimes de violences ont été accueillies, soutenues et conseillées par les spécialistes de l'Unité spéciale, a indiqué Mme Bruigom. Pour ces 131 cas, il y a eu une intervention de la police-secours et une plainte a été enregistrée. "Toutes ont accepté ce nouveau suivi".
Lors de ces rencontres, souvent entre 20 minutes et une heure, les agents ont évalué les risques encore encourus et mis en œuvre les mesures de protection nécessaires. Une grille d'évaluation de la situation des victimes de violences développée par des spécialistes de la police judiciaire a servi de base.
Environ 20% de ces victimes ont même bénéficié d'un suivi ultérieur afin de recevoir un soutien et des conseils sur la durée, a précisé la cheffe de l'unité, composée de 25 personnes. Outre la responsable, seize membres de la police-secours, six agents de proximité et deux policiers judiciaires font partie de l'équipe. Ils bénéficient d'une formation spéciale.
Le municipal en charge de la police Pierre-Antoine Hildbrand et le commandant de la police municipale Olivier Botteron ont annoncé un renforcement des effectifs. Une criminologue épaule désormais Mme Bruigom et un membre supplémentaire de la police judiciaire sera engagé d'ici l'été.
L'accueil des victimes se fait sur rendez-vous, après un premier contact avec la police. Il peut s'agir de personnes violentées dans le cadre familial ou agressées dans la rue en raison de leur genre, de leur orientation sexuelle ou de leur appartenance ethnique ou religieuse.
L'espace n'est pas réservé aux femmes, mais ouvert à tous. Par souci de discrétion, la police ne souhaite pas rendre l'emplacement public.
Durant l'année écoulée, le personnel de l'Unité spéciale s'est aussi engagé dans deux actions de prévention. La première, sous forme d'exposition, menée en hiver 2022 en collaboration avec le Bureau vaudois de l'égalité entre femmes et hommes et la Commission cantonale de lutte contre les violences domestiques (CCLVD) a permis de sensibiliser 1120 jeunes aux problèmes de violence domestique.
La seconde s'est déroulée durant le premier trimestre 2023 au travers d'un prospectus d'information "Brisons le silence", qui a été adressé à 700 professionnels des métiers de la santé lausannois (pharmaciens, médecins, gynécologues, etc).
Les autorités lausannoises envisagent d'ici 2024 une campagne de prévention visant les auteurs de violences domestiques. Enfin, de façon à garantir la prise en charge et le suivi de l'ensemble des phénomènes de violence et de harcèlement à Lausanne, la gestion de la plateforme "harcèlement de rue" est maintenant du ressort de cette Unité spéciale.