Berne ne prévoit pas d'accueillir les Afghans en grand nombre
Seuls les Afghans employés par Berne et leurs familles pourront venir en Suisse. Le Conseil fédéral ne prévoit pas d'accueillir en grand nombre les ressortissants de ce pays d'Asie, tombé aux mains des talibans.
A la faveur du retrait des troupes américaines, les talibans ont reconquis la quasi-totalité de l'Aghanistan en une dizaine de jours, faisant craindre exactions et représailles. Depuis, les organisations humanitaires et la gauche font pression pour que la Suisse accueille plus de réfugiés. Berne n'est toutefois pas prête à franchir ce pas.
"Je comprends la demande", a assuré la ministre de justice et police Karin Keller-Sutter devant les médias à Berne. Mais l'ONU commence à peine à évaluer la situation sur place. Une analyse des besoins doit être effectuée, avant toute action. "La Suisse ne peut pas décider toute seule d'établir un programme de réinstallations."
"On peut tout faire, mais aussi des dégâts. Il faut une action réfléchie et structurée. Laissons les organisations compétentes nous dire quels sont les besoins", a abondé le ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis. Et d'assurer que le corps d'aide suisse était prêt à intervenir "dès ce soir" si nécessaire.
"La Suisse ne reste jamais les bras croisés", a-t-il poursuivi. Ce sont les pays voisins, comme l'Iran ou le Pakistan, qui absorberont le gros des flux migratoires. "Les besoins humanitaires y seront importants et la Suisse sera sur place". Un accueil supplémentaire de réfugiés afghans n'est pas non plus exclu ultérieurement, mais seulement après une demande de l'agence onusienne en charge.
Pour le moment, Berne a prévu de n'accueillir que les employés locaux de son bureau de coopération à Kaboul, temporairement fermé, et leur famille proche. Ces employés sont probablement considérés comme des collaborateurs de l'Ouest, a expliqué Karin Keller-Sutter. "Ils sont en danger."
Tous sont prêts à être évacués. Mais ce n'a pas encore été possible. "Les avions civils ne peuvent pas atterrir à l'aéroport de Kaboul", sécurisé par les forces américaines, a précisé Ignazio Cassis. "La situation est toutefois très volatile. Elle pourrait changer dans les heures à venir."
Au total, environ 230 personnes seraient concernées. Elles seront décomptées du contingent de réinstallation de 800 personnes pour 2021. "C'était la manière la plus simple, la plus rapide et la moins bureaucratique pour les faire venir", a pointé Karin Keller-Sutter.
Et la Saint-Galloise de préciser que la procédure habituelle n'a pas été suivie. Etant employées par la Direction du développement et de la coopération (DDC), les personnes concernées n'ont pas fait l'objet d'un examen de sécurité sur place ni dû montrer une volonté d'intégration. Elles recevront l'asile à leur arrivée en Suisse.
L'accueil d'autres Afghans devra lui suivre la procédure habituelle. Une demande de visa pourra être déposée personnellement auprès d'une représentation suisse à l'étranger. Et un visa humanitaire ne sera octroyé que si la personne fait état d'une menace directe et sérieuse contre elle. Selon une pratique constante, elle doit aussi pouvoir se prévaloir d’un lien étroit et actuel avec la Suisse.
Les demandes de regroupement familial ou d'asile déposées en Suisse seront également examinées selon les dispositions ordinaires. Le Secrétarait d'Etat aux migrations a en revanche suspendu jusqu’à nouvel ordre l’exécution des décisions de renvoi entrées en force.
Les six collaborateurs suisses ont quant à eux été rapatriés. Une trentaine d'autres ressortissants helvétiques voulant quitter le pays se sont également annoncés. Berne oeuvre sans relâche pour les évacuer, a indiqué le Tessinois qui se dit préoccupé par la gravité de la situation.
"Le Conseil fédéral appelle avec insistance tous les acteurs impliqués à respecter le droit international humanitaire et les droits humains", a-t-il insisté. Les droits des minorités, ainsi que ceux des femmes et des filles en particulier, doivent être garantis.
Les ressortissants afghans et étrangers qui souhaitent quitter le pays doivent pouvoir le faire librement et sans obstacle, a-t-il encore ajouté. Les routes, les aéroports et les postes frontières doivent rester ouverts à cette fin.