Des migrants formés et rémunérés pour accompagner d'autres migrants dans leur intégration
Des migrants, installés de longue date en Valais, mandatés et payés pour accompagner des compatriotes dans leur intégration. Le Valais est le premier canton romand à introduire le métier de « bâtisseurs de ponts ».
Des migrants mandatés pour accompagner d’autres migrants dans leur intégration socioprofessionnelle. Le Valais est le premier canton romand à mettre en place un réseau de bâtisseurs et bâtisseuses de ponts sur son territoire. Les bâtisseurs de ponts, ce sont des personnes au bénéfice d’un passé migratoire, formés pour assurer le lien entre les membres de leurs communautés, les instances et institutions cantonales et la population locale.
Accompagnement personnalisé
Ces volontaires sont formés par la "National coalition building institute" (NCBI), basé à Berne, qui a déjà lancé des réseaux de bâtisseurs de ponts dans plusieurs cantons alémaniques. Ils sont ensuite sollicités par les institutions ou les personnes migrantes elles-mêmes et rémunérées pour leurs services. Il peut s’agir de courrier à ouvrir et à traduire, de relations avec le service de l’enseignement pour leurs enfants, ou d’accompagnement pour découvrir la culture locale. Bref, les services peuvent être divers, sur appel et personnalisés.
Christine Bourdin est cheffe de projets à l'office valaisan de l'asile. En contact avec la NCBI depuis 4 ans pour introduire le concept en Valais, elle est convaincue de ses atouts: "ces personnes peuvent interagir d'une manière très différente avec les nouveaux arrivants. Déjà parce qu'ils ne sont pas perçus comme des membres de l'institution", analyse Christine Bourdin, "ensuite, parce qu'ils connaissent la langue maternelle de ces personnes et leur culture, ce que ne peuvent pas apprendre les assistants sociaux."
"Je sais comme c'est difficile d'arriver d'un autre pays"
Le Valais compte aujourd’hui 14 bâtisseurs et bâtisseuses de ponts, représentant une dizaine de communautés étrangères. "Ces personnes sont toutes connues de nos services pour y être passés eux-mêmes à leur arrivée en Suisse", indique Christine Bourdin, . "Nous avions pressenti et contacté une trentaine de candidats, et 14 ont finalement accepté de se lancer."
Parmi eux, Shilan Salim représente la communauté kurde irakienne. "Je sais à quel point il est difficile d'arriver d'un autre pays et d'une autre culture et de s'intégrer", raconte-t-elle. "Du coup j'ai dit oui tout de suite quand on m'a proposé le projet."
Au terme de sa formation, Shilan Salim a suivi une famille de 4 personnes dans leur quotidien, qu'il s'agisse de traduire leur courrier ou de faire le lien avec le service de l'enseignement. "L'an dernier, les enfants ont vécu leur année scolaire sans matériel, jusqu'au dernier jour", explique la bâtisseuse de pont. "Cette année, nous avons préparé une liste et fait les achats ensemble et ça se passe bien mieux, pour la famille et pour l'école."
Shilan Salim leur a également fait découvrir des services publics comme la Ludothèque. "Leur revenu étant insuffisant pour acheter des jouets à leurs enfants, ils sont ravis de pouvoir en emprunter."
Travail rémunéré
Des projets similaires existent déjà en Valais, mis en place par des institutions ou communes, à l’image du projet « tandem » en Valais central. Tous se pratiquent de manière bénévole. Alors, rémunération, bonne ou mauvaise idée ? "La seule dynamique qui pourrait être cassée par un tel projet, et c'est tant mieux, c'est la non-reconnaissance du travail de ces bâtisseurs de ponts", affirme Christine Bourdin.