Jeanny Morard, 37 ans au service des travailleuses et travailleurs
Il met fin à 37 ans de lutte syndicale. Ce vendredi, le désormais ancien secrétaire régional UNIA Valais Jeanny Morard prend officiellement sa retraite. Il ne perd pas pour autant ses idéaux : fédérer les travailleurs et lutter pour une meilleure répartition des richesses.

Grosse journée pour Jeanny Morard. Le syndicaliste met fin aujourd’hui à une carrière de 37 ans de lutte, dont 16 à la tête du secrétariat régional d’UNIA. Cerise sur le gâteau, il fête ce vendredi ses 61 ans et son départ en retraite anticipée.
En 1984, engagé sans postuler
Il reste pourtant pragmatique, Jeanny Morard lorsque nous le rencontrons, quelques jours avant son départ officiel. Pas du genre à faire dans le sentimentalisme. Quitter UNIA après une si longue carrière, ça va lui faire bizarre, mais voilà, c’est un choix qu’il assume totalement. Il faut dire que ce socialiste a voué toute sa vie à la lutte syndicale.
«Très jeune, j'étais déjà dans les jeunesses de la Fédération suisse des ouvriers du bois et du bâtiment (FOBB). Et puis à 24 ans, on m'a proposé un job de permanent. J'ai dit oui, parce que pour moi c'était une expérience... hé bien cette expérience a duré 37 ans.»
«Quand on fait ce métier, il faut savoir perdre. On perd d'ailleurs très souvent.»
Jeanny Morard, ancien secrétaire régional UNIA Valais.
Nous sommes alors en 1984 et Jeanny Morard est engagé sans postuler. Première campagne et aussi première défaite : l’initiative nationale en faveur des 40 heures de travail hebdomadaire est refusée. «Quand on fait ce métier, il faut savoir perdre. On perd d'ailleurs très souvent. Mais je n'ai aucun regret. Peut-être que dans certaines campagnes, on aurait pu faire certaines choses différemment, mais on l'a toujours fait avec conviction, ensemble avec les travailleurs... Et il faut dire que l'on a également eu de belles victoires!»
La grève, quelque chose qui se prépare
En matière de victoires, il se souvient surtout de la lutte pour la retraite à 60 ans dans le domaine de la construction, au niveau national. «Celle-là a très clairement été un très beau succès. Le combat s'est fait pendant 4-5 ans et on ne s'attendait pas à ce que cela arrive si vite. Mais ça ne s'est pas fait tout seul! Il avait fallu que des milliers de travailleurs se mobilisent, fassent des grèves, et des grèves importantes.»
Le socialiste se souvient également de la mobilisation des maçons impressionnante de 2018 pour le renouvellement de la convention collective de travail. Il se réjouit également de l’augmentation du nombre de membres du syndicat au niveau valaisan : de 10'000 à 12'000 en quelques années.
La grève, il ne la voit pas comme une fin en soi. Cela reste un outil. Et les mobilisations se préparent parfois des années à l'avance: «On ne téléphone par comme ça du jour au lendemain aux gens pour leur dire, vendredi, c'est grève. Il faut rassurer les gens, montrer les enjeux, expliquer les objectifs. Mais quand on arrive à faire ce travail en amont, on se rend compte que cela marche. Les gens comprennent qu'on peut le faire. Et alors, on se donne les moyens de réussir.»
Avant, des patrons, aujourd'hui, des économistes
Si les manifestations et les grèves ne sont pas une fin en soi selon Jeanny Morard, parfois ces mobilisations sont nécessaires face à un front patronal toujours plus dur.
«Se lever le matin en disant qu'on va faire la révolution et puis se coucher le soir en faisant rien, ce n'est pas la bonne manière d'agir.»
Jeanny Morard, ancien secrétaire régional UNIA Valais.
Il rigole Jeanny Morard lorsqu'on lui demande qu'elles étaient ses rêves, à 24 ans. «Je vous rassure, j'en ai toujours!». Il nous parle de meilleure répartition des richesses, d’un réelle reconnaissance de la valeurs des travailleuses et travailleurs, de ses craintes pour le personnel du secteur de la vente par exemple. Mais pour les lui, les idéaux ne suffisent pas:
«Je crois que dans ce métier, il faut garder les pieds sur terre. Se lever le matin en disant qu'on va faire la révolution et puis se coucher le soir en faisant rien, ce n'est pas la bonne manière d'agir. Il faut avoir des objectifs à long terme, il faut poser des jalons et puis être patient.»