Visite controversée d'Erdogan à Chypre
Erdogan appelle à un dialogue sur la base de "deux Etats séparés"
Recep Tayyip Erdogan a appelé dimanche à des pourparlers sur la base de "deux Etats séparés" à Chypre. Le président turc a fait une visite controversée dans la partie nord de l'île méditerranéenne, occupée par la Turquie depuis près de 50 ans.
"Il y a deux peuples et deux Etats séparés à Chypre. Il faut des pourparlers pour une solution sur la base de deux Etats séparés", a affirmé M. Erdogan dans un discours à Nicosie peu après son arrivée. Les derniers pourparlers de paix intercommunautaires en 2017 entre Chypriotes-grecs et Chypriotes-turcs sous égide de l'ONU, effectués sur la base d'une réunification de l'île, avaient échoué.
Pour M. Erdogan, les plans pour une réunification de l'île sous un Etat fédéral font désormais partie du passé.
"Vous ne pouvez faire sécher le linge d'aujourd'hui avec le soleil d'hier", a-t-il martelé, une expression imagée en référence aux précédentes négociations qui n'ont pas réussi à mettre fin à la division de l'île.
Chypre est divisée depuis l'invasion de son tiers nord par la Turquie en 1974 en réponse à un coup d'Etat visant à rattacher l'île à la Grèce.
La République de Chypre, seule reconnue par la communauté internationale et membre de l'Union européenne, exerce son autorité au sud d'une zone tampon surveillée par l'ONU. La République turque de Chypre-Nord (RTCN), autoproclamée, contrôle le tiers nord où sont stationnés quelque 30'000 soldats turcs.
L'élection le 18 octobre du nationaliste Ersin Tatar, soutenu par Ankara, à la "présidentielle" en RTCN a changé la donne. Contrairement à son prédécesseur, Mustafa Akinci, partisan d'une réunification sous un Etat fédéral, M. Tatar défend une solution à deux Etats.
Arrivé plus tôt dans la journée dans le nord de Chypre, M. Erdogan a prévu, après son passage à Nicosie, "pique-niquer" à Varosha (est), ancienne cité balnéaire réputée, abandonnée par ses habitants et bouclée par l'armée turque après l'invasion de 1974.
Cette cité-fantôme, devenu un des symboles de la division de Chypre, a été partiellement rouverte en octobre. Le président chypriote Nicos Anastasiades a qualifié la visite de M. Erdogan de "provocation" et de politique du "fait accompli" d'Ankara qui "démontre ainsi ne pas respecter le droit international".
"La Turquie et son président torpillent la perspective d'un climat approprié demandé par le secrétaire général de l'ONU pour lancer son initiative de résolution du problème chypriote", a ajouté M. Anastasiades dans un communiqué avant l'arrivée du président turc. La Grèce a elle estimé que la visite constituait une "violation directe des résolutions" de l'ONU.
Une rencontre doit être prochainement convoquée par l'ONU entre Chypriotes-turcs et Chypriotes-grecs, la Grèce, la Turquie et la Grande-Bretagne, ancienne puissance coloniale.