"Un dimanche noir" pour l'UDC
Plébiscite pour la libre circulation, gifle pour l'UDC (presse)
Au lendemain du "non" à 61,7% des Suisses à l'initiative de l'UDC dite de limitation, la presse romande voit un plébiscite pour la libre circulation. Elle pointe également une "gifle" pour l'UDC, qui a perdu quatre des cinq objets soumis au vote.
"C'est un dimanche noir" pour l'UDC, écrit le Journal du Jura, paraphrasant le conseiller fédéral Jean-Pascal Delamuraz après le refus des Suisses d'entrer dans l'Espace économique européen (EEE) en 1992. "Trois citoyens sur cinq ont balayé la très populiste initiative dite de limitation", précise le quotidien. "À l'heure où la crise consécutive à la pandémie de coronavirus frappe de plein fouet l'économie du pays, les électeurs n'ont pas voulu en rajouter une couche".
Avec le Covid-19, "certaines boussoles ont retrouvé leur nord", fait écho Le Courrier, qui souligne pour sa part les quatre victoires de la gauche sur les cinq objets soumis au vote. À "une fermeture des frontières comme l'induisait l'initiative de limitation de l’UDC", les Suisses ont préféré "trouver une voie dynamique d'échanges avec les pays voisins en protégeant les salariés plutôt que le rejet et la peur du personnel frontalier, dont nos hôpitaux ont par ailleurs besoin pour tourner", ajoute le journal genevois.
Pour Le Temps, le non à plus de 61% est "un plébiscite pour la libre circulation des personnes" et une confirmation que "la voie bilatérale est la bonne stratégie" avec l'Union européenne (UE). Si ce succès est dû à une "campagne exemplaire" avec une "alliance forte" entre patrons et syndicats, il est "aussi celui d'une femme: Karin Keller-Sutter", la ministre de la justice qui s'est engagée "sans compter dans cette votation avec un discours clair et positif [...] Avec cette victoire, la Saint-Galloise prend une nouvelle dimension au sein du gouvernement".
Outre une confirmation à l'attachement à la voie bilatérale, le peuple suisse a "clairement reconnu son erreur du 9 février 2014", lorsqu'une faible majorité avait accepté l'initiative "Contre l'immigration de masse", juge Le Quotidien Jurassien. "Ce refus était crucial pour l'avenir du pays au plan économique, mais aussi pour les relations de bon voisinage avec l'Union européenne".
Mais si "le premier parti du pays a reçu une gifle sur son terrain de prédilection", le résultat de dimanche est "un 'oui' à l'Europe sous conditions", écrit La Liberté. "Le Conseil fédéral devra en effet décider dans les prochaines semaines de signer ou pas l'accord institutionnel avec l'UE", rappelle le journal fribourgeois. "Or, comme la météo, le thermomètre politique, en Suisse, a perdu brutalement quelques degrés et le projet sur la table ne convainc plus grand monde".
Plusieurs points très sensibles sont encore ouverts, précise Le Temps: "les mesures d'accompagnement, la directive relative aux droits des citoyens européens et les aides d'Etat".
Face à une UE qui ne veut plus de la voie bilatérale, "mais exige un accord institutionnel qui liera la Suisse aux décisions de la Cour européenne de justice", les négociations s'annoncent comme un "chemin de croix" pour la Suisse, estiment La Tribune de Genève et 24 Heures.
"Comme il est dangereux de dire franchement non à un mastodonte comme l’UE, le Conseil fédéral va jouer la montre en présentant une liste de revendications. On assiste donc en direct à un lent pourrissement des relations malgré les discours officiels", ajoutent-ils, soulignant un risque de sanctions de Bruxelles. "Et l’accord institutionnel, qui n’était déjà pas très frais, deviendra moribond".
