Pas de Gaucho pour les betteraves
L'OFAG interdit le néonicotinoïde Gaucho pour les betteraves
L'Office fédéral de l'agriculture (OFAG) n'a pas donné suite jeudi à une demande d'autorisation temporaire des producteurs de betteraves pour le néonicotinoïde Gaucho. Selon un professeur d'université, d'autres pesticides ont été autorisés par l'OFAG.
Cette année, les cultures de betteraves ont subi une attaque importante de jaunisse virale, virus transmis par les pucerons. Pour les producteurs touchés, ces pertes peuvent atteindre 50%. Les betteraviers avaient donc demandé une autorisation urgente temporaire pour utiliser à nouveau l’enrobage des semences par des néonicotinoïdes.
Problème: ce produit dénommé Gaucho a été interdit le 1er janvier 2019 en raison du risque pour les pollinisateurs. Après consultation des milieux concernés le 30 septembre, l'OFAG maintient cette interdiction. Il autorise en revanche deux produits de traitements foliaires pour lutter contre les pucerons. Il a également lancé un programme de recherche pour trouver des méthodes alternatives.
Les producteurs sont déçus par cette réponse. Plusieurs autres pays de l'UE, dont la France, ont autorisé temporairement l'usage des néonicotinoïdes pour protéger leur filière sucrière. La décision de l'OFAG risque de mettre en difficulté l'économie sucrière suisse.
Elle entraîne une distorsion de la concurrence entre le sucre indigène et le sucre importé issu d’une production moins durable. La Fédération Suisse des Betteraviers exige donc que seul le sucre produit sans pesticides interdits en Suisse soit importé. Des interventions allant dans ce sens ont été déposées au Parlement.
Pro Natura et BirdLife Suisse ont elles salué la décision de la Confédération. Plutôt que de lutter contre les symptômes, la culture sucrière suisse a besoin d'une stratégie globale.
Mais selon le professeur de biologie Edward Mitchell, à l'Université de Neuchâtel, l'OFAG "dupe la population". Le membre du comité d'initiative "Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse" note que si l'office n'a pas autorisé à nouveau le Gaucho, il a décidé d'octroyer une autorisation d'urgence à deux pesticides de synthèse, l'un neurotoxique et l'autre reprotoxique, pour la culture de betteraves.
Selon lui, ces deux pesticides dits systémiques "rendent toute la plante toxique et sont particulièrement néfastes pour la biodiversité et nuisent à la santé humaine". Cette décision de l’OFAG représente "un inquiétant retour en arrière contrairement à ce qui pourrait être compris en première lecture rapide de son communiqué de presse", a ajouté Edward Mitchell.
Contacté, l'OFAG précise que les deux pesticides nouvellement autorisés pour les betteraves sont 100 à 1000 fois moins toxiques pour les abeilles et les organismes aquatiques que le Gaucho. "On n'est pas du tout dans la même catégorie de risques", explique Olivier Félix, responsable du secteur Protection durable des végétaux à l'OFAG.
En outre, son mode d'utilisation est complètement différent. Alors que le Gaucho implique un traitement systématique des semences de betteraves avant la mise en terre, les produits de traitements foliaires sont appliqués seulement en cas d'apparition de pucerons. C'est un traitement qui n'intervient qu'en cas de nécessité.