L'Azerbaïdjan crie vengeance
Treize civils tués en Azerbaïdjan, le président crie vengeance
L'Azerbaïdjan a juré samedi de "venger" la mort de treize civils dans le bombardement nocturne de Gandja, deuxième ville du pays. Ces frappes marquent une nouvelle escalade du conflit du Nagorny Karabakh entre Azerbaïdjanais et séparatistes arméniens.
Quelques heures avant ces frappes, des tirs avaient visé la capitale des indépendantistes, Stepanakert, et la ville de Choucha, dont la majorité des habitants ont fui depuis le début des hostilités le 27 septembre.
A Gandja, de nombreuses maisons ont été détruites par un pilonnage vers 03h00 locales qui a tué treize civils, dont des enfants, et fait plus de 45 blessés, selon le procureur général. "Nous allons nous venger sur le champ de bataille", a proclamé le président azerbaïdjanais Ilham Aliev dans un discours.
Il a qualifié son ennemi séparatiste et son parrain, l'Arménie, tour à tour de "chiens" et de "fascistes". Son allié turc a accusé l'Arménie de "crimes de guerre". L'UE a quant à elle "déploré" ces frappes, et appelé une fois encore "toutes les parties à cesser de viser les civils".
A Gandja, des habitants en larmes fuyaient dans la nuit, certains en pyjama et pantoufles, a constaté l'AFP. "Toutes les maisons autour ont été détruites. Beaucoup de personnes sont sous les décombres", se lamente Roubaba Jafarova, 65 ans, devant les restes de sa maison.
Des dizaines de secouristes ont cherché des survivants à mains nues et rassemblé des restes humains déchiquetés dans des housses mortuaires noires. "On ne peut pas identifier les corps, on ne sait pas si on arrivera à les identifier à la morgue. Ils sont tous en morceaux", dit, épouvanté, Mayil Chakhnazarov, 36 ans.
La ville d'environ 300'000 habitants a été frappée à plusieurs reprises depuis le début du conflit, notamment dimanche lorsqu'un missile avait déjà fait dix morts.
Les séparatistes arméniens ont relevé samedi pour leur part que Gandja abrite "des cibles légitimes": base aérienne, état-major d'une brigade motorisé, forces spéciales, centre des opérations de la défense azerbaïdjanaise, dépôts de carburant et usines de munitions.
Ils ont accusé aussi l'Azerbaïdjan d'avoir attaqué durant la nuit des infrastructures civiles du Karabakh, nécessitant une riposte. Stepanakert a en effet été secoué par des explosions, selon l'AFP. Une frappe a détruit notamment une partie du toit d'un centre commercial et, plus loin, les vitres de commerces et d'un immeuble d'habitation ont volé en éclats.
"Ce qui s'est passé là est insensé. Comment la communauté internationale peut être si indifférente!", s'emporte Gaïane Gharibian, une Arménienne de 45 ans, qui dormait au sous-sol.
Sur le front, les combats ont continué aussi. Ilham Aliev a annoncé samedi la prise de nouveaux territoires, notamment Fizouli "ville occupée depuis trente ans par des bêtes sauvages". Cette zone forme l'un des sept districts azerbaïdjanais dont les séparatistes ont pris le contrôle dans les années 1990 pour constituer un glacis de protection autour du territoire à proprement parler du Nagorny Karabakh.
Ces bombardements, ainsi que les combats sur la ligne de front, témoignent de l'impuissance depuis trois semaines de la communauté internationale. Depuis une semaine, un accord de trêve humanitaire négocié sous l'égide de Moscou n'a jamais été appliqué. Washington et Paris ont de nouveau insisté vendredi soir sur la nécessité d'arrêter les hostilités.
L'Azerbaïdjan a obtenu des gains territoriaux ces trois dernières semaines sans pour autant remporter de bataille décisive. Bakou n'a pas jusqu'ici révélé le coût du conflit, ne publiant aucun bilan militaire, matériel ou humain.
Les séparatistes affirment avoir tué des milliers d'hommes, reconnaissent avoir dû reculer mais assurent "contrôler la situation". Officiellement, ils ont perdu environ 700 hommes, et la moitié des 140'000 habitants ont été déplacés.
Le Nagorny Karabakh, majoritairement peuplé d'Arméniens chrétiens, a fait sécession de l'Azerbaïdjan, musulman chiite turcophone, peu avant la dislocation de l'URSS en 1991, entraînant une guerre ayant fait 30'000 morts. Un cessez-le-feu, émaillé de heurts, était en vigueur depuis 1994.