Hommage à Paris au professeur décapité
Professeur décapité: dizaines de milliers de personnes rassemblées
Des dizaines de milliers de personnes se sont rassemblées dimanche partout en France pour rendre hommage à un professeur, décapité vendredi pour avoir montré à ses élèves des caricatures de Mahomet. Cet attentat islamiste a suscité émotion et effroi dans le pays.
A Paris, c'est l'emblématique place de la République, épicentre de l'énorme défilé du 11 janvier 2015 après les attentats djihadistes contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher, qui a été choisie. Pancartes à la main, "Je suis prof", "Non au totalitarisme de la pensée", "Liberté d'expression, liberté d'enseigner", les manifestants ont salué dans le calme la mémoire de cet enseignant.
D'autres manifestations se tenaient dans les grandes villes françaises, comme Lille, Lyon ou Nice.
Plusieurs personnalités politiques de tous bords étaient présentes à Paris: le Premier ministre Jean Castex, la maire socialiste de Paris Anne Hidalgo, la présidente de droite de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, le chef de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, ou l'ancien chef de l'Etat socialiste François Hollande.
"Vous ne nous faites pas peur. Nous n'avons pas peur. Vous ne nous diviserez pas. Nous sommes la France !", a tweeté Jean Castex, images de la manifestation à l'appui.
Certains manifestants portaient des pancartes où étaient affichées des caricatures de Mahomet publiées par Charlie Hebdo. Des Marseillaise ont été entonnées.
Guigané, 34 ans et médiatrice socio-culturelle en région parisienne, son fils de quatre ans sur les épaules, est venue rendre hommage au professeur assassiné et "s'indigner contre cet acte odieux et affreux". "Il ne faut pas que cette violence s'installe et devienne notre quotidien, ni qu'on s'y habitue", affirme-t-elle.
Vendredi après-midi, ce père de famille de 47 ans a été décapité près du collège où il enseignait l'histoire-géographie à Conflans-Sainte-Honorine, dans la banlieue ouest de Paris. Son assaillant, un réfugié russe d'origine tchétchène de 18 ans, a ensuite été abattu par la police.
En plein débat le séparatisme religieux, l'assassinat a profondément choqué le pays. Dès samedi, à Conflans-Sainte-Honorine, un millier de parents, élus ou simples citoyens se sont rassemblés avec émotion samedi devant le collège où travaillait la victime.
Les élèves étaient particulièrement affectés, à l'instar de Marie, lycéenne venue devant son ancien établissement déposer des fleurs en hommage à son ancien professeur. "Je me souviens de son cours sur la liberté d'expression. On avait parlé de Charlie, on avait fait des dessins qui sont encore accrochés dans le collège", explique-t-elle.
Hommage national
Un hommage national sera rendu mercredi en coordination avec la famille de l'enseignant assassiné, a annoncé l'Elysée, sans en préciser le lieu.
Selon les éléments dévoilés par le procureur anti-terroriste Jean-François Ricard, le professeur avait organisé avec ses élèves un débat, prévu dans le cadre des cours d'éducation civique, au cours duquel il a montré des caricatures du prophète Mahomet. Il avait alors proposé aux élèves qui le souhaitaient de ne pas regarder certains dessins.
- Repérages -
Le père d'un élève, placé en garde à vue, s'était indigné de ce cours dans plusieurs vidéos, rendant public sur internet le nom du professeur et l'adresse du collège. Il est allé rencontrer la principale pour demander son renvoi. Le professeur avait ensuite reçu plusieurs appels de menaces.
Connu pour des antécédents de droit commun mais pas des services de renseignements pour radicalisation, le tueur avait procédé à des repérages vendredi après-midi près du collège, selon M. Ricard.
Un message adressé à Emmanuel Macron, "le dirigeant des infidèles", expliquant vouloir se venger de celui "qui a osé rabaisser" le prophète et la photo de sa victime décapitée ont été retrouvés dans son téléphone. Ils avaient également été postés sur Twitter.
Au total, onze personnes ont été interpellées et placées en garde à vue depuis vendredi soir, notamment des proches de l'assaillant, mais aussi certaines personnes ayant livré le professeur à la vindicte sur les réseaux sociaux.