Campagne d'une rare âpreté
Après un débat cacophonique, Trump et Biden retournent en campagne
Donald Trump et son adversaire démocrate pour la Maison Blanche Joe Biden retournent mercredi sur le terrain au lendemain d'un premier débat à l'image d'une campagne d'une rare âpreté, mais qui a permis à l'ancien vice-président de 77 ans de démontrer son endurance.
Malgré les 90 minutes de cacophonie, le camp démocrate semblait rassuré par la prestation de son candidat qui, sans s'asseoir ni prendre de pause, a tenu le choc et montrait qu'il n'était pas l'"endormi" si souvent raillé par Donald Trump.
"Vous avez vu l'authenticité de Joe Biden et la sienne, le contraste...", s'est félicitée Nancy Pelosi, présidente démocrate de la Chambre des représentants, sur MSNBC.
"Film d'horreur", "pire débat de l'histoire", "fiasco", "shitshow" (bordel): les commentateurs n'avaient pas de mots assez durs pour décrire l'émission télévisée de mardi soir à Cleveland, un débat sans vrai débat d'idées, au point que certains ont appelé à l'annulation des deux autres prévus en octobre.
"Le summum du divertissement", a tweeté le rappeur 50 Cent. "Impossible de vivre quatre ans de plus de cette catastrophe ambulante", a écrit le chanteur John Legend, qui soutient le démocrate.
"C'était le débat présidentiel le plus chaotique et agressif de notre histoire", dit à l'AFP Mitchell McKinney, professeur à l'université du Missouri et spécialiste de ces rendez-vous inaugurés en 1960. "L'image donnée par Donald Trump fut celle d'un président irascible. Joe Biden a évité de faire des gaffes ou de trébucher, ce qui aurait alimenté l'idée promue par Trump qu'il est trop vieux ou pas assez en forme pour être président."
Le président de 74 ans, revenu à Washington dans la nuit, sera en meeting mercredi soir dans le Minnesota, tandis que Joe Biden se rend en train en Pennsylvanie, faisant plusieurs étapes dans cette région industrielle où il convoite le vote ouvrier.
A chaque débat télévisé, des sondages express sont réalisés par des médias pour savoir qui a "gagné". Selon une telle enquête de CBS, Joe Biden l'aurait légèrement emporté mais 69% des spectateurs se sont surtout dits "agacés". Il faut aussi rappeler qu'en 2016, Hillary Clinton avait été déclarée largement gagnante de ses trois débats contre Donald Trump, ce qui relativise l'importance de ces duels...
La différence avec 2016 est que le candidat démocrate, contrairement à Mme Clinton, a pu s'appuyer sur les quatre ans du bilan du président sortant, et Joe Biden n'a pas manqué de rappeler les 200'000 morts de la pandémie de Covid-19: "Nous avons 4% de la population mondiale et 20% des morts"... "Il a paniqué."
L'ancien vice-président l'a qualifié de "pire président que l'Amérique ait jamais eu", de "clown" et de "caniche de Poutine". "Tout le monde sait que c'est un menteur", a-t-il asséné.
"Il n'y a rien d'intelligent en vous", a de son côté martelé Donald Trump qui, en mauvaise posture dans les sondages, espérait un faux pas de son rival qui n'a pas eu lieu, bien que Joe Biden ait bredouillé à plusieurs reprises.
Mâchoires serrées, le dirigeant, qui brigue le 3 novembre un second mandat de quatre ans, s'est efforcé de dépeindre le démocrate comme une marionnette de la "gauche radicale", que ce soit sur la santé, la sécurité ou le climat.
Si Joe Biden s'est engagé à accepter le résultat du scrutin, Donald Trump a lui esquivé, se bornant une fois de plus à affirmer sans preuves que le vote par correspondance, qui s'annonce important en raison du Covid-19, favoriserait des "fraudes" et pourrait empêcher de connaître le vainqueur "avant des mois".
Le dirigeant a peiné, tout au long du débat, à reprendre la main, tentant continuellement d'interrompre "Joe" jusqu'à se faire fermement rappeler à l'ordre par le modérateur, le journaliste de Fox News Chris Wallace, qui se retrouvait mercredi attaqué comme partial par le camp trumpiste.
"Deux contre un, ce n'était pas une surprise mais c'était sympa", a tweeté Donald Trump mercredi.
Le républicain s'est aussi attiré de vives critiques pour sa réponse trouble lorsque le journaliste lui a demandé s'il était prêt à condamner les suprémacistes blancs. "OK Proud Boys, reculez et tenez-vous prêts", a répondu Donald Trump.
Le groupe d'extrême-droite Proud Boys, fondé en 2016, est lié à plusieurs épisodes de violences contre des manifestants antiracistes.
Les deux autres débats présidentiels sont prévus les 15 et 22 octobre. La semaine prochaine, leurs colistiers, le vice-président Mike Pence et la sénatrice démocrate Kamala Harris, débattront ensemble.