Sœur Marie-Thérèse à Riddes : le spectacle humoristique qui fâche des membres d’Ecône
La venue du spectacle Sœur Marie-Thérèse des Batignolles, une nonne excentrique, ne passe pas inaperçue à Riddes. La communauté d’Ecône ne s’est pas fait prier pour réagir. Elle demande l’annulation de la représentation.
Sœur Marie-Thérèse des Batignolles est quelque peu persona non grata à Riddes. Une quinzaine de membres de la Fraternité Saint-Pie-X d’Ecône a adressé une lettre au Conseil communal pour demander l’annulation de la représentation prévue ce vendredi soir à la salle de l’Abeille.
L’un des courriers, envoyé à la présidente de la commune et dont Rhône FM s’est procuré une copie, va même plus loin. Son auteur, un membre de Civitas, un mouvement catholique-intégriste, menace la commune d’une plainte pour bafouement des convictions religieuses d’autrui au sens de l’article 261 du code pénal. Son auteur estime que cette pièce est blasphématoire et offense les convictions religieuses des membres d’Ecône.
Il n'en est rien, estime de son côté le Conseil communal, qui a notifié aux auteurs des lettres une fin de non-recevoir. Il assure que le spectacle n’a pas de volonté de blesser les catholiques. «Le Conseil communal est conscient que le spectacle puisse heurter la sensibilité de certains de nos citoyens», argumente Christel Duc, présidente de la commune de Riddes. «Le Conseil communal a décidé de maintenir ce spectacle. Il a été très clair dans sa décision. La diversité culturelle se fait à travers différents modes artistiques», poursuit l'élue, qui assure faire face à cette situation pour la première fois.
«Je tombe des nues. Je croyais que le mot tolérance existait dans la religion»
Gabriel Dermidjian, comédien
Quant au fait que la pièce est jouée un Vendredi saint, la commune assure que c’est le fruit du hasard et qu’elle a essayé de déplacer la date. «Le comédien, les techniciens et la production font une halte à Riddes dans le cadre d’une tournée. C’était extrêmement compliqué de changer la date», explique Arnaud Favre, administrateur culturel de la commune de Riddes. «Je continue d’avoir carte blanche sur les spectacles joués à Riddes», se réjouit-il.
Une polémique qui surprend
Le personnage de Sœur Marie-Thérèse des Batignolles est issu d’une bande-dessinée (BD) humoristique française, écrite et dessinée par Maëster. Elle est parue pour la première fois en 1982 et met en scène une nonne excentrique et atypique qui boit, qui se drogue et qui fait même des galipettes. La religieuse trash se fait même canoniser par le Vatican durant le spectacle.
«Les gens ne sont pas obligés d’assister au spectacle»
Arnaud Favre, administrateur culturel de la commune de Riddes
Sœur Marie-Thérèse est incarnée par le comédien français Gabriel Dermidjian. Contacté, il se dit abasourdi par la polémique qui enfle à Riddes. «Je tombe des nues. Je croyais que le mot tolérance existait dans la religion», s’étonne-t-il. Je suis moi-même catholique», poursuit-il dans un plaidoyer en faveur de Sœur Marie-Thérèse. «Il y a tellement de bienveillance dans ce spectacle, tellement de fragilité. On a une bonne-sœur plein d’amour et de carence. Elle a des moments de doutes et elle en parle à Dieu. Alors oui, elle le taquine», conçoit le comédien. «Elle est forte en excès mais ça reste très amusant.»
Aucune volonté de provoquer
Le spectacle Sœur Marie-Thérèse des Batignolles a déjà été joué à plusieurs reprises en France, à Vienne notamment devant une salle de 800 places comble. «Les gens étaient debout à la fin du spectacle,» précise Gabriel Dermidjian. En Suisse, la pièce sera interprétée la première fois vendredi soir à la salle de l’Abeille de Riddes. Un Vendredi saint, à Riddes, une provocation ? «Pas du tout», rétorque le comédien. «Je ne savais même pas que Riddes accueillait le siège d’Ecône. Ce n’est pas du tout ciblé,» assure Gabriel Dermidjian, rejoint sur ce point par l’administrateur culturel de Riddes, Arnaud Favre. «Les gens ne sont pas obligés d’assister au spectacle.»
«Ma seule arme, c’est de demander à ces gens-là de venir voir le spectacle»
Gabriel Dermidjian, comédien
Gabriel Dermidjian ose par contre lui inviter tout le monde à se rendre vendredi soir au spectacle. «Ma seule arme, c’est de demander à ces gens-là de venir voir le spectacle et d’en débattre» lance-t-il en forme d’invitation. A quel moment ils ont tous les droits, se questionne-t-il. Moi j’aimerais aussi défendre ma démarche humaine.»