Valaisan, adopté et en quête de ma famille biologique

Oriane Binggeli
Journaliste RP

Depuis 2018, les cantons sont tenus d’accompagner les enfants adoptés qui souhaitent retrouver leur famille biologique. Paperasse, espoir, ou parfois désillusion, la procédure peut s’avérer éprouvante, mais indispensable pour ces enfants en quête d’identité.

"J'ai toujours eu cette envie de savoir à qui je ressemblais et quelle était mon histoire." Chaque année, des valaisans d’adoption se lancent en quête de leur famille biologique. Depuis 2018, les cantons sont tenus de créer des services d’informations et de recherches pour accompagner les enfants adoptés qui souhaitent faire cette démarche.

Connaître ses origines: un droit légal

L’an dernier, le Valais a reçu 14 demandes dans ce sens, 17 en 2020, et 9 en 2019. Ces demandes passent toutes par l’office cantonal de la jeunesse. Son chef Christian Nanchen concède que certaines démarches s’avèrent plus difficiles que d’autres, en fonction du pays de naissance de l'enfant. Pour les personnes nées à l'étranger, c'est souvent par le service social international que transitent les dossiers. Mais l’accès à la connaissance de ses origines est un droit de plus en plus reconnu. "On a donné beaucoup plus de poids à la nécessité pour les personnes qui ont grandi dans le cadre d'une adoption de revendiquer légalement ce droit à l'information", analyse-t-il.

Compléter son puzzle identitaire

Benoit Carron est psychologue spécialiste en psychothérapie et gère son propre cabinet à Sion. Au cours de sa carrière, il a reçu et accompagné des familles adoptantes, des enfants, ados ou jeunes adultes issus d’autres cultures et d’autres pays. Et il confirme que la question identitaire peut être d’autant plus forte pour les personnes qui ont été séparées de leurs racines biologiques. "C'est une question qui appartient à chacun, mais qui entraîne plus de complexité et de multiplicité quand il s'agit d'une personne adoptée", dépeint-il. ""Ma peau, mon caractère, ma façon d'être dans ce monde correspond-elle à ceux de mon pays d'accueil?"."

"J'ai voulu en apprendre plus quand je suis devenue maman"

Parmi les demandes reçues par le canton depuis 2018, celle d’Anaïs Bezacier-Mahiet: née en Serbie dans les années 70, c’est en octobre 2020 qu’elle d’entreprend les démarches pour retrouver sa mère biologique. "J'ai toujours eu cette curiosité, cette envie de savoir à qui je ressemblais, explique-t-elle. Mais de manière saine et sans ressentiment". Quand on lui demande qu'elle a été l'élément déclencheur, elle évoque l'arrivée de ses enfants. "J'ai découvert le rôle de maman et le lien puissant que je peux avoir avec eux. ça m'a donné envie d'en apprendre plus, de pouvoir aussi leur transmettre toutes les informations sur mon histoire et la leur."

Les recherches ont duré plus de 14 mois mais ont fini par payer puisque la maman de Anaïs a été retrouvée il y a quelques jours via le service social international. "Elle a accepté qu'on soit mises en contact", sourit Anaïs Bezacier-Mahiet. Une rencontre est prévue pour le printemps. "J'ai déjà attendu tellement d'années que quelques semaines de plus ou de moins ne devraient pas faire de différence. Mais je ronge un peu mon frein", admet-elle en riant.

Celle qui vit désormais à Sion avec ses quatre enfants dit espérer en apprendre plus sur son histoire et pourquoi pas établir un contact ou une correspondance. "ça me ferait plaisir qu'on se parle ou qu'on s'écrive de temps en temps". Affaire à suivre, donc. 

Entretien à écouter en entier ci-dessous.

De moins en moins d'adoption en Suisse

En Valais, 4 enfants ont été accueillis sur le territoire cantonal en 2021, en vue d’une adoption. Le nombre d’adoptions a sévèrement chuté ces dernières décennies. En 2020, 33 enfants de moins de 4 ans ont été adoptés dans le pays. 4 fois moins qu’en 2014 et 8 fois moins qu’en 2010.
Ce n’est pas la demande qui est en cause, selon l’office valaisan de la jeunesse. Mais plutôt l’évolution politique de l’adoption internationale. Puisque de plus en plus de gouvernements s’engagent à trouver des familles d’accueil à l’intérieur même de leurs frontières, avant de se tourner vers l’étranger. "La volonté de ne pas déraciner l’enfant de sa culture d’origine pèse dans la balance, explique Christian Nanchen, chef du service cantonal de la jeunesse, ce qui est une bonne chose."
OB
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