Claude Nicollier : "Je pense qu'on pourra explorer la planète Mars mais pas y habiter"
Il est le premier et unique Suisse à avoir été dans l’Espace à ce jour. Claude Nicollier était présent à Sion lundi soir pour donner une conférence aux étudiants de l’aumônerie de la HES-so.
Lundi soir, quelques 200 étudiants étaient réunis dans l'aula de la HES-so de Sion dans le cadre de l'aumônerie des écoles tertiaires. La raison : une conférence menée par Claude Nicollier, unique Suisse à avoir été dans l'Espace, accompagné par le prêtre Dominique Rimaz, passionné d'aviation et d'astronomie. Pour rappel, l'astrophysicien et astronaute vaudois a passé plus de 42 jours dans l'Espace, répartis sur quatre missions entre 1992 et 1999.
Ces dernières semaines, le thème du monde spatial est souvent relayé dans la presse. La bonne occasion pour avoir son avis sur l'actualité :
Rhône FM : Quel est l'objectif d'Artemis ? ...Car nous avons déjà été sur la Lune...
Claude Nicollier : « Pendant très longtemps, nous sommes restés en orbite sur la Terre. Les Américains voulaient retourner sur la Lune avec l'idée de tester et entraîner les capacités humaines à vivre sur le long terme sur un autre corps céleste . Ensuite, l'objectif est d'aller sur la planète Mars pour éventuellement y habiter. Les missions Apollo étaient très courtes. Artemis, c'est beaucoup plus long : des semaines, des mois voire des années sur la Lune ».
Vous étiez quatre fois dans l'Espace. Quels souvenirs gardez-vous ?
« Que des souvenirs extrêmement positifs. Si je devais en retenir qu'un seul, ce serait le fait d'avoir fait des travaux de maintenance et de réparation sur le télescope Hubble. C'était en décembre 1993 et décembre 1999. C'était une mission de rêve ! ».
Regarder la Terre depuis ce hublot, ça fait quoi ?
(Rires). « Je dirai qu'il y a quatre caractéristiques de la Terre depuis l'Espace, en orbite basse. On réalise qu'elle est très belle, sa beauté m'a beaucoup touché. La Terre est petite, on fait le tour du globe en une heure et demie. Ensuite, je dirais "isolée" car on la voit comme un corps céleste et les prochains, ce sont la Lune ou le Soleil. On a vraiment l'impression qu'elle est isolée. Et pour finir, je dirai qu'elle est fragile : on voit les cicatrices que l'humain produit, que ce soit la déforestation ou encore la mise à feu de la végétation sur différents endroits de la Terre ».
Habiter sur Mars, vous y croyez ?
« Explorer, oui. Mais y habiter, je n'y crois pas trop. C'est simplement une obsession d'Elon Musk...».
Vous parlez d'Elon Musk... Le tourisme spatial, vous le voyez comment ?
« Je n'ai pas de problème avec cela. Cela coûte cher mais si des gens fortunés préfèrent cela plutôt qu'acheter des jets, châteaux ou yachts privés : je n'y vois pas où est le problème, à condition que cela reste modéré. Mais si on en vient à avoir un vol touristique par jour, ce serait dommageable pour la Terre ».
Vous êtes le seul Suisse à avoir été dans l'Espace. Vous vous rendez compte ?
(Rires). « Oui, car c'est une réalité. J'espère cependant qu'une Suissesse ou qu'un Suisse me succèdera. Actuellement, il y a une nouvelle sélection à l'ESA (NDLR. L'Agence Spatiale Européenne) et la décision sera prise dans un ou deux mois. J'espère que ce sera une personne de nationalité suisse parmi les 22 pays-membres ! »
Mais concrètement, arrivez-vous à prendre du recul sur votre parcours ?
« Oui, j'arrive en le partageant. Je le fais à l'EPFL car j'enseigne, je le fais auprès des écoles ou du public. C'est un immense plaisir pour moi de partager mon expérience et ce privilège d'avoir pu aller dans l'Espace ! »
L'avenir dans l'Espace, vous le voyez comment ?
« L'être-humain est un être explorateur qui a besoin de comprendre et de satisfaire sa curiosité. On va continuer d'utiliser l'Espace proche (orbite terrestre basse). Mais il y aura des destinations plus lointaines comme Mars ou encore Titan, le plus grand satellite de Saturne. Et éventuellement le satellite de Jupiter... Je pense que cela ne s'arrêtera pas là, ça va continuer. Il faut cependant qu'on continue de s'occuper de notre planète Terre, c'est une nécessité absolue mais sans arrêter l'exploration spatiale ».